Dans son dernier rapport sur le suivi de la situation économique en Algérie, la Banque mondiale a indiqué qu' »en l’absence de mise en œuvre effective des réformes structurelles prévues, la vulnérabilité de l’économie algérienne s’aggravera ».
« La mise en œuvre effective du vaste programme de réforme favorisera la transition vers une trajectoire de croissance durable », a estimé la Banque mondiale dans son document publié le 22 décembre 2021, soulignant que « le Plan d’Action du Gouvernement a pour ambition de favoriser la transition de l’économie vers un modèle de croissance durable, tiré par le secteur privé, et de rétablir les équilibres macroéconomiques. »
À cet égard, ce Plan d’Action, lit-on dans le même rapport, « plaide en faveur de la poursuite des réformes de la gestion des finances publiques et de la rationalisation de dépenses, notamment en passant d’un système universel de subventions publiques coûteuses à un système ciblé favorisant l’équité sociale », et « préconise des améliorations transversales et significatives de l’environnement des affaires, notamment par la réforme de la loi sur les investissements ou de la loi bancaire ainsi que par des gains de productivité à travers la restructuration et l’ouverture à l’actionnariat privé du capital des banques et entreprises publiques. »
Dans le même temps, note la même source, « le pays reste toujours dépendant des recettes des hydrocarbures, et sa marge de manœuvre s’est réduite. » « Ces dernières années, les politiques de compression des importations et les vagues de dépréciation du taux de change ont permis de limiter en partie la hausse des déficits du compte courant et budgétaire, la dépréciation augmentant notamment la valeur en monnaie nationale des recettes d’exportation des hydrocarbures, malgré une baisse des volumes d’exportation. »
« Néanmoins, les recettes budgétaires hors hydrocarbures couvrent une part décroissante des dépenses publiques (47 % en 2020) et les exportations hors hydrocarbures couvrent une part croissante mais marginale des importations (7 % en 2020) », relève le rapport, qui ajoute : « Dans un contexte d’inflation croissante des prix à la consommation et à la production, l’apport soutenu de liquidités par la Banque d’Algérie (BdA), la dépréciation du taux de change et la compression des importations auront un impact croissant sur la stabilité monétaire, la reprise économique et le niveau de vie des Algériens. »
« La mise en œuvre de réformes structurelles visant à accroître la compétitivité, tout en rétablissant les équilibres macroéconomiques et en protégeant les ménages algériens, sera essentielle pour favoriser l’indépendance de l’Algérie vis-à-vis des recettes des hydrocarbures », indique la Banque mondiale,
Dans ce contexte, l’institution de Bretto Woods souligne que « les principaux risques » pesant sur ses prévisions de croissance et perspectives économiques à moyen terme sont les suivants :
1. Des recettes en devises inférieures aux attentes en raison d’une demande en hydrocarbures et de prix inférieurs aux attentes, qui pourraient creuser les déficits budgétaires et extérieurs, renforcer le risque d’un ajustement désordonné (par exemple, du taux de change ou de la demande intérieure) pour protéger les réserves internationales. Des besoins de financement budgétaire plus élevés pourraient également conduire à une absorption supplémentaire des liquidités bancaires et à une consolidation de l’investissement public, entravant la croissance. En outre, la propagation de nouveaux variants de la COVID-19 à l’échelle mondiale pourrait contribuer à la volatilité des prix des hydrocarbures.
2. Des progrès insuffisants dans la mise en œuvre des réformes structurelles et des politiques en faveur d’une reprise durable dans le secteur privé pourraient menacer la croissance et retarder la transformation structurelle de l’économie algérienne qui l’éloignerait de sa dépendance vis-à-vis des recettes des hydrocarbures. La baisse structurelle de la croissance dans les secteurs hors-hydrocarbures continuerait, entravant la substitution des importations, et alimentant ainsi les pressions inflationnistes dans un contexte de baisse du taux de change.
« L’amélioration des agrégats macroéconomiques devrait être de courte durée »
L’institution de Bretton Woods indique que « l’amélioration des agrégats macroéconomiques devrait être de courte durée ». Selon les prévisions de la Banque mondiale, « la croissance du PIB réel atteindra 4,1 % en 2021, puis diminuera progressivement à moyen terme » et que « dans le scénario de référence d’une campagne soutenue de vaccination contre la COVID-19, aucune restriction sanitaire ne devrait être réintroduite ».
« Toutefois, les entreprises et les ménages ont été gravement touchés par la crise économique et, en l’absence d’un programme de réformes structurelles rapide et décisif pour relancer la croissance, les segments hors-hydrocarbures de l’économie ne se redresseront que progressivement, la reprise des investissements et du crédit étant retardée », note le rapport, qui ajoute : « Par ailleurs, une augmentation temporaire de la consommation publique soutiendra la croissance à court terme. Du côté de la production, les rendements agricoles devraient rebondir et la levée des restrictions sanitaires liées à la COVID-19 devrait favoriser un rétablissement complet du secteur des services. »
« La hausse de la production et des investissements dans les hydrocarbures soutiendra la croissance, dans un contexte de rétablissement progressif des quotas de production de pétrole brut et de production soutenue de gaz naturel, alors que l’avantage tiré des contrats indexés sur les prix du pétrole devrait se maintenir à moyen terme », prévoit la même source, en ajoutan que « le solde du compte courant devrait s’améliorer nettement en 2021 et 2022 avec le pic des exportations d’hydrocarbures, mais se détériorer ensuite », et que « dans le scénario de référence, les prix mondiaux des hydrocarbures restent élevés et le volume des exportations se redresse, avant de repartir à la baisse avec la reprise de la consommation intérieure, selon lamême source. »
« Les efforts visant à comprimer les importations sont soutenus, mais ils sont en partie compensés par l’augmentation des importations d’intrants et d’équipements pour soutenir l’investissement, la production nationale et la reprise, et par la hausse des prix à l’importation », relève le document, qui prévoit que « la chute des réserves internationales devrait donc nettement ralentir en 2021 et 2022 avant de s’accélérer à nouveau, tout en restant à un niveau confortable sur la période de projection. »
Pour ce qui est du déficit budgétaire global, celui-ci « devrait s’améliorer en 2021, mais il devrait se dégrader lentement par la suite dans un contexte de diminution attendue des recettes pétrolières et de rebond des dépenses publiques », prévoit encore la Banque mondiale, qui ajoute que « les recettes pétrolières affectées au budget national devraient plafonner en 2022, alors que les exportations se redressent et que la dépréciation du taux de change par rapport au dollar américain se poursuit. Cependant, le rythme de cette dépréciation ne suffira pas à compenser la baisse des exportations par la suite. »
La Banque mondiale a indiqué que « les recettes fiscales se redresseront, suivant la reprise de l’activité et de la valeur des importations. D’autre part, les dépenses publiques augmenteront en 2021 et 2022 dans le cadre d’une politique de dépenses expansionniste, alors que les investissements publics reprennent et que les coûts des projets continueront d’augmenter ».
La croissance des interventions spéciales du Trésor devrait être durable, dans un contexte de soutien public continu à la caisse nationale des retraites, aux EPE et aux banques publiques, selon le même rapport qui a précisé que « la dette publique continuera d’augmenter rapidement, tout en restant à des conditions favorables ».
La politique monétaire visera à équilibrer la nécessité de financer la reprise et le déficit public tout en maîtrisant la montée des pressions inflationnistes. « L’inflation restera élevée pendant la période de projection, détériorant ainsi le pouvoir d’achat des ménages dans la mesure où la dépréciation du taux de change et les politiques de compression des importations entraînent une raréfaction des produits importés, ainsi qu’une augmentation du coût de la consommation et de l’investissement », prévoit également la Banque mondiale, soulignant que « malgré l’amélioration des conditions de liquidité, les besoins élevés de financement budgétaire et les préoccupations liées à la préservation de la stabilité monétaire limiteront la disponibilité du crédit pour financer la reprise. »