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Moncef Bouderba, Président de l’Association des céramistes algériens, « nous pouvons mettre 30% de la production globale à l’exportation » (partie I)

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Le président de l’Association des céramistes algériens, Mohamed Moncef Bouderba, est revenu dans cet entretien, sur la situation du secteur du bâtiment en général durement touché par la crise sanitaire, et de la filière céramique en particulier en Algérie.

Algérie-Eco : Près d’un an après l’instauration du confinement pour endiguer la propagation du coronavirus Covid-19, dans quelle situation se trouve le secteur du bâtiment en Algérie ?

M. Moncef Bouderba : À partir des années 2000, tous les gouvernements successifs ont engagé un programme de logements qui avait été initié par l’ancien président pour absorber le déficit de logements tous types confondus et l’accent a été mis sur le logement promotionnel. 

Il y a eu un effort considérable qui a été fait. 70% des chantiers du programme qui a été initié il y a 15 ans, ont été réceptionnés et le programme des logements a été bénéfique pour l’Algérie.

A partir de 2015, il y a eu un essoufflement des ressources, avec une baisse des revenus issus des hydrocarbures par conséquent le programme du logement a été touché par cette baisse. A partir de 2015, il n’y a pas eu l’inscription de nouveaux programmes sensibles. Il y a une volonté politique de l’actuel gouvernement de finaliser tout ce qu’a été enclenché à cette époque.

Le programme du logement consiste à mettre sur le marché 5 millions d’unités, on est autour de 2,5 de logements réalisés et fin 2021, nous allons atteindre les 3 millions de logements réalisés. Il serait intéressant de voir comment on peut terminer ce programme, ce qui permettra de relancer la machine économique.

Dans le contexte actuel marqué par la crise sanitaire du Covid-19 et par la baisse des ressources en devises issues des hydrocarbures, la question se pose de manière un peu plus difficile pour le gouvernement de tenir ses engagements et si c’est le cas, à quel prix ? Je pense qu’il va y avoir une réévaluation des prix.

Je pense que les revenus en hydrocarbures de l’Algérie vont surement se stabiliser, dans une fourchette entre 40$ et 50$ le baril, ce qui nous donne des revenus entre 25 et 35 milliards de dollars par an et il faut trouver des solutions pour aller vers une économie alternative qui puisse créer des richesses.

Le Covid-19 a largement contribué à la baisse sensible de l’activité dans le secteur du bâtiment qui n’a pas bénéficié de mesures compensatoires ou substantielles, bien au contraire, nous avons honoré nos engagements envers nos employés.

Nous avions espéré, à un certain moment, que le gouvernement puisse faire un geste au niveau des charges sociales et fiscales des entreprises. Il n’y a pas eu de mesures spécifiques pour le secteur du bâtiment, nous n’avons pas été renfloués.

Le 31 mai dernier, le gouvernement a décidé de libéré l’activité de production des usines activant dans le secteur, et il faut compter au minimum un mois pour que l’activité puisse reprendre sa dimension de départ. Cette levée progressive des mesures du confinement dans le secteur, nous a permis de retrouver notre croissance et nos chiffres d’affaires.

Nous avons d’ailleurs bénéficié, à ce titre, d’une mesure exceptionnelle de retard qui nous a permis de déposer nos bilans au 31 décembre, alors que l’année fiscale doit se faire en mars. C’est une mesure exceptionnelle de report qui nous a permis de redémarrer et de relancer l’activité.

Le bâtiment est aujourd’hui dans une situation catastrophique, parce que le programme de logement n’a pas été totalement à 100% relancé, alors que le gouvernement a donné des instructions pour la relance de et la finalisation de ce programme. Toutefois, il y a des signes au niveau des auto-constructeurs qui se sont mis à construire. C’est grâce à eux que nous avons pu réaliser entre 50 et 60 du chiffre d’affaires d’avance le Covid.

La filière de la céramique est-elle touchée de la même manière par le Covid-19 que le secteur du BTPH ou a-t-elle été plus ou moins épargnée ?

Le secteur de la céramique en Algérie est aujourd’hui totalement au  niveau international. Il bénéficie d’une cinquantaine d’usines, d’une capacité installée qui avoisine les 200 millions de m2 par an.

La consommation annuelle de céramique en Algérie est évaluée entre 130 et 140 millions de m2 par an, il y a donc un excédent de bonne qualité qui nous permis d’aller à la conquête des marchés africains et du Moyen-Orient, sans aucun complexe, puisque nous avons la qualité et les prix.

Mais, il y a un travail d’accompagnement qui doit se faire, d’abord avec un accompagnement matériel, la révision de la politique bancaire, douanière et de transport, la création d’un fonds de compensation à l’export.

Le gouvernement doit prendre en considération toutes nos revendications, sinon on ne peut pas aller concurrencer les marchés en Egypte et en Turquie qui sont des grands producteurs de céramique.

La Tunisie et le Maroc sont des pays nettement exportateurs de céramique depuis une trentaine années, leur système financier et bancaire est à la disposition des opérateurs, ce qui leur donne un avantage par rapport aux Algériens.

On est très loin du fonctionnement des Tunisiens et des Marocains. Si leurs produits ont envahi les marchés mondiaux, c’est grâce à leur climat juridique qui leur a permis de bien comprendre les enjeux.

Les céramistes algériens ont-ils les capacités d’aller sur les marchés mondiaux pour exporter ?

L’exportation n’est un acte administratif et il faut qu’il y ait un fonds de compensation qui puisse compenser les pertes au niveau des prix, notamment quand nos prix ne sont pas concurrentiels. Nous souhaitons être consulté pour apporter des solutions.

Dans le secteur de la céramique en Algérie, les niveaux de production nous permettent de mettre très facilement entre 25% et 30% de la production globale à l’exportation. Toutefois, le transport terrestre est un handicap pour les exportateurs, avec des coûts exorbitants, mais il faut un travail de ciblage des produits qui seront destinés à l’export et des filières capables d’exporter et de concurrencer les produits étrangers.

La banque centrale doit réfléchir à une grande réforme qui soit capable de créer un mode révolutionnaire de fonctionnement et sortir du système bancaire archaïque algérien qui n’est pas encourageant pour l’exportation. Un opérateur économique doit disposer à 100% de la convertibilité de la monnaie.

En 2018, le gouvernement algérien avait décidé de manière arbitraire et sans consultation préalable, dans le souci d’une campagne de faire des économies sur des produits importés, d’interdire l’importation de matière première entrant dans la production de la céramique.

En 2017, l’Algérie a importé 57 millions de matière première pour 35 usines opérationnelles, soit 1,6 millions d’euros par usine. Le chiffre d’affaires réalisé par le secteur de la céramique en Algérie en 2017 était de 2,8 milliards de dollars, alors que le gouvernement algérien a importé la même année 69 millions de dollars d’amandes, répartis entre 3 importateurs. Les amandes ne produisent aucune valeur ajoutée, excepté les taxes au niveau des douanes.

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