Plusieurs spécialistes du droit constitutionnel, ont critiqué la mouture portant sur la révision de la Constitution, en affichant leurs déceptions quant aux amendements apportés dans le document, notamment en ce qui concernent les prérogatives du président de la République.
Pour l’ex-membre du conseil constitutionnel, Amar Rekhia, il n’a pas caché sa déception quant à la forme et au contenu de la mouture de la nouvelle constitution.
Selon sa déclaration à Algérie-Eco, la mouture n’apporte pas des changements profonds comme cela a été annoncé auparavant. Le Pr Rekhia impute la responsabilité de ces propositions aux membres du comité d’experts qu’ils les ont formulé et qui ne se sont pas encore exprimés.
Allant plus dans les détails, le constitutionnaliste a regretté que le chef de l’Etat s’est accaparé de plusieurs pouvoirs contrairement à ses promesses, « il a promis de réduire ses prérogatives mais là, on constate que c’est l’inverse ». Dans ce cas-là, « ils n’ont qu’a garder la même constitution de Bouteflika», et « de ne pas dire aux gens qu’on a fait un changement ».
S’agissant de la Cour constitutionnelle, le juriste a indiqué que les dispositifs inclus dans la mouture ne garantissent pas l’indépendance de la justice. « Avec les désignations des membres de la Cour, soit de la part du président ou bien ceux issus de l’administration du parlement, qui seront surement des militants politiques, constitue une menace pour la neutralité des décisions de la Cour».
Sur le plan économique, « ce projet favorise encore la politique de l’assistanat et ne prend pas en considération la réalité de la situation sur le terrain ». Toutefois, il a considéré que le texte proposé « est beaucoup plus lourd avec ses 240 articles, au lieu des 213 d’avant, estimant que plusieurs articles auraient été mieux s’ils étaient introduits comme dans des lois organiques.
Pour sa part, le professeur universitaire spécialiste dans le droit constitutionnel, Réda Deghbar a signalé lui aussi dans une vidéo postée sur son compte facebook, la contradiction entre les promesses du président Tebboune et ce qui est apporté dans les amendements avancés dans le document notamment en ce qui concerne les prérogatives du président de la République : « la mouture proposée renforce les pouvoirs du chef de l’Etat dans les institutions notamment dans l’institution militaire, le ministère des affaires étrangères, la justice ». Il évoque aussi « la désignation du chef de gouvernement qui est une prérogative du président, ainsi que de dissoudre le parlement, et la ratification des conventions internationales.»
Selon le professeur du droit constitutionnel, Fawzi Oussadik, ces réformes ne sont qu’une montagne qui a accouché d’une souris. « Nous attendions une constitution qui répond aux aspirations du peuple, une refonte profonde, mais nous sommes surpris par des retouches, pour dire aux gens qu’ils ont réellement réalisé un changement.»
Dans ses remarques générales, il a indiqué que « le changement du Conseil constitutionnel, par une Cour constitutionnelle, n’est pas suffisant si cela n’est pas suivi par des garanties d’indépendance de la justice et de neutralité des jugements ». Le Pr Oussadik a indiqué que « la constitution est là pour préserver les droits des minorités, intellectuelles ou idéologiques ce qui est la base de toute une démocratie qui préserve les équilibres dans une société.»
Pour ce qui est du poste du vice-président, « le texte est ambigu, le fait que l’article 117, précise que le vice-président, remplace et poursuit le mandat du président de la République, dans le cas ou ce dernier démissionne », « on risque de se retrouver avec un président illégitime si cela devait se produire» a-t-il signalé.