La dérive financière du montage de voitures en Algérie continue de susciter les réactions des experts et des analystes. Pour le professeur Abderrahmane Mebtoul, il s’agit de poser objectivement la problématique de la rentabilité future des usines de montage de voitures qui doit s’inscrire dans le cadre d’une véritable politique tant économique qu’industrielle qui fait cruellement défaut.
Il suggère dans ce sens plusieurs propositions en s’interrogeant d’abord, qu’en sera-t-il avec l’épuisement inéluctable des hydrocarbures en termes de rentabilité économique et non de découvertes physiques sur le pouvoir d’achat des Algériens? Dans ce cas par rapport au pouvoir d’achat réel, (alimentaires, habillement notamment plus les frais de loyer et téléphone) et avec le nivellement par le bas des couches moyennes, que restera –il en termes de pouvoir d’achat réel pour acheter une voiture, le niveau d’endettement ayant une limite ? La période de hausse des salaires avec des rappels a permis d’augmenter la demande, la demande actuelle ne dépasse pas 100.000/150.000 voitures an si on la relie au pouvoir d’achat actuel, explique le professeur.
« Troisièmement, le marché local a-t-il les capacités d’absorption et ces opérateurs, seront- ils capable d’exporter pour couvrir la partie sortie de devises et donc quelle sera la balance devises des unités projetées ? », s’interroge aussi MMebtoul.
Pour lui, une politique industrielle sans la maitrise du savoir est vouée inéluctablement à l’échec avec un gaspillage des ressources financières. Aussi l’industrie automobile étant devenue capitalistique, (les tours à programmation numérique éliminant les emplois intermédiaires) quel est le nombre d’emplois directs et indirects créés, renvoyant à la qualification nécessaire tenant compte des nouvelles technologies appliquées à l’automobile ? Et quelle sera le coût et la stratégie des réseaux de distribution pour s’adapter à ces mutations technologiques?
En conclusion le professeur estime que le montage de voitures renvoie une politique industrielle cohérente. Solution de facilité, on annonce, après plus de 14 ans d’interdiction, la levée de l’interdiction sur l’importation des véhicules d’occasion de moins de trois ans instaurée depuis 2005. Cette mesure fera t- elle baisser les prix sur le marché national ? Cela n’est pas évident pour lui.
« Le problème qui se pose est le suivant : le cours appliqué sera-t-il celui de l’officiel environ 135 dinars un euro ou bien les ménages importeront-ils en référence au cours du dinar sur le marché parallèle un écart d’environ 50% par rapport au marché officiel, dans les deux cas, auquel il faudra ajouter les taxes douanières. Toutes ces mesures montrent clairement, comme je l’ai affirmé depuis 2009 un manque flagrant d’une vision stratégique du développement d’une manière générale et de la politique industrielle d’une manière particulière assistant à du replâtrage », précise-t-il.
Selon lui, si on l’avait continué dans l’ancienne politique du montage des voitures, cela aurait conduit inévitablement comme à une véritable hémorragie financière avec des sorties de devises pour 500.000 unités de montage entre 9/10 milliards de dollars/an horizon 2020, un tiers des recettes de Sonatrach au cours de 60/65 dollars le baril.