Le journaliste Mahrez Rabia a été limogé de la chaîne nationale Canal Algérie qui a prétexté une « prise de poids ». Une décision loin d’être innocente qui cache (mal) une énième censure de la direction de l’entreprise publique.
La chaîne francophone de l’EPTV a mis abruptement fin au contrat de la figure médiatique, après 14 ans de bons et loyaux services, en invoquant son surpoids. Une excuse pour le moins curieuse, au regard de la condition physique de dizaines des animateurs télé qui, eux, prennent soin de tapir leurs convictions réelles quant à l’évolution de la situation politique depuis le 22 février.
Car la piste de la censure reste en effet la plus probable, les publications (publiques) du journaliste sur les réseaux sociaux et sa liberté de ton dans les différentes émissions qu’il anime ne sont un secret pour personne. Muni de son appareil et de son sens aigu de la justice, il livre chaque fois que l’occasion se présente, vendredis évidemment compris, images et pensées sur le mouvement populaire ayant débuté le 22 février. Publications à retrouver sur sa page Facebook officielle.
https://www.facebook.com/MahrezRabiaOfficiel/posts/1320036111510644
Esprit libre sur les plateaux et les réseaux sociaux, mais aussi sur le terrain du militantisme pour la liberté de la presse. En avril dernier, au journal L’Orient-Le Jour, il avait déploré la mobilisation timide des employés de la Télévision Publique, comparée à celle qui s’était organisée dès février à la Radio, avec, rappelons-le, la démission de l’animatrice iconique Meriem Abdou.
« Même si, dans la forme, on a l’impression que la parole s’est libérée, dans le fond et dans les sujets traités, il n’existe aucune liberté d’expression actuellement. La terreur du système est toujours là. Le problème des médias, c’est qu’ils se mettent à plat ventre devant l’armée. » (Mahrez Rabia, 4 avril 2019)
Contacté par le reporter Moncef Ait-Kaci, il s’est déclaré « fier » de cette rupture de contrat. « Je sors de l’EPTV avec la satisfaction d’avoir fait mon devoir, d’avoir donné jusqu’au bout mon maximum dans cette émission, d’avoir été sincère et de m’être battu pour mes idées jusqu’au bout », a-t-il confié. Et de conclure : « Une voix me répète sans cesse : qu’il n’existe jamais de fin, que la fin de quelque chose n’est que le début d’autre chose ».
Sur sa page Facebook, il déclare qu’il n’est pas dupe, révélant que son travail de couverture du Hirak et le documentaire qu’il réalise, également consacré au Hirak, « en-dehors des murs de Canal Algérie » n’étaient pas bien reçus par la direction par la Télévision Algérienne. Ne se considérant pas comme une victime, ses pensées vont à « tous ceux et celles qui sont emprisonnés aujourd’hui en raison de leurs convictions politiques ».
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