Une « initiative pour une sortie de la crise » a été lancée lundi comptant des personnalités publiques telles qu’Ahmed Taleb-Ibrahim, Ahmed Benbitour ou encore Abdelaziz Rahabi. Un des signataires de la déclaration de l’initiative publiée le lendemain, Me Hachem Saci, avocat à Khenchela, a accordé une interview à Algérie Eco où il a clarifié certains points du texte.
Algérie Eco : Vous avez mentionné la libération des détenus du Hirak et la levée des restrictions sur manifestations comme conditions préalables à ce que l’Initiative qualifie de crise. Que feriez-vous si les autorités ne satisfont pas ces exigences ?
L’Initiative entend principalement soutenir le mouvement et revendiquer la légitimité nécessaire à tout processus de transition démocratique. Les revendications circonstancielles du Hirak résultent de ses interactions avec le système. Cela a abouti à des abus à l’encontre des militants, notamment des arrestations et des détentions arbitraires, pour avoir exprimé des opinions contraires aux orientations du système actuel. Les signataires comptent, par conséquent, davantage sur la pression, la sensibilisation et la lutte du Hirak populaire pour concrétiser exigences. Plus, en tout cas, qu’ils n’attendent une réponse volontaire du système.
AE : L’Initiative n’est pas contre l’idée d’une élection. Quelle pourrait être la solution dans ce cadre ? Un candidat commun ?
L’initiative ne rejette pas les élections radicalement, en effet. Tout personne sensée sait que l’élection est un instrument important dans l’action démocratique. Ceci dit, l’élection ne peut constituer la totalité ni même la finalité de la solution. La déclaration de l’Initiative indique clairement que celle-ci n’envisage l’opérabilité de l’élection programmée actuellement, elle appelle à un dialogue sérieux afin de développer une feuille de route consensuelle entre tous les acteurs permettant une véritable transition démocratique. Et ce, afin d’édifier une véritable république comme le rêvaient les pères fondateurs qui avaient déclenché la guerre de libération.
AE : La liste des signataires comprend des avocats, tels que vous-même, et des professeurs d’université, aux côtés d’anciens hommes d’État et des militants syndicaux. Comment en êtes-vous venus à ce travail en commun ?
Une vaste opération de coordination a été poursuivi plusieurs semaines durant, partant des bases du Hirak et ses activités, pour arriver à la désignation de ces personnalités qui ont prouvé des positions de soutien au mouvement. Deux des signataires en particulier ont joué un rôle important dans la coordination et la communication, à savoir les professeurs Seif el Islam Benattia et Nacer Djabi. Dr Ahmed Taleb Brahimi a joué un rôle majeur en tant que pierre angulaire de cette initiative, compte tenu notamment de ses initiatives passées et sa vigilance, dans les efforts collectifs, au respect de la diversité et la multiplicité des courants et des affiliations pour les canaliser dans la concrétisation des aspirations du Hirak.
AE : La liste des signataires de l’initiative ne comprend que très peu de politiciens. Une réponse au slogan « Yetnahaw gaâ » ?
Nous n’adhérons pas à la logique de l’exclusion et nous ne pouvons que reconnaître le rôle joué par les militants dans l’opposition qui ont marqué pendant des décennie la scène algérienne par leurs luttes et leurs empreintes politiques. Nombre d’entre eux ont, d’ailleurs, réagi, favorablement à l’Initiative de sortie de crise. Celle-ci appelle, du reste, tous ces acteurs parmi les soutiens du Hirak à participer à un dialogue visant à déboucher sur une feuille de route consensuelle. Une feuille de route qui contribuera à la réalisation des revendications du mouvement et à laquelle on ne pourrait arriver sans l’apport de ces hommes et femmes.
AE : En tant qu’homme de droit, quelles mesures suggérez-vous pour réaliser la souveraineté populaire évoquée dans la déclaration de l’Initiative ?
L’Initiative prône, en effet, le rejet de la tutelle imposée par le régime au peuple ainsi que la manipulation des lois suprêmes de l’État contenues dans la Constitution. Elle appelle ainsi instamment à respecter la souveraineté populaire et à mettre en place des mécanismes pour y parvenir. Et ceci ne peut être réalisé que par l’établissement d’institutions étatiques découlant de la volonté populaire réelle fondée sur un système juridique du texte le plus élevé, à savoir la constitution, jusqu’aux décrets et règlements compatibles avec le principe d’État de droit et de l’État civil moderne.
J’ai déjà eu, à titre personnel, à dresser des propositions dans ce sens, et qui sont consultables. Mais nous recherchons, en tant que collectif, des solutions de compromis autour desquelles convergeront toutes les visions et propositions personnelles. Nous nous concentrons donc sur l’action collective pour formuler une solution qui assure de la réalisation des exigences du Hirak avec succès.