Le prix Nobel d’économie a été attribué lundi à la Franco-Américaine Esther Duflo et aux Américains Abhijit Banerjee et Michael Kremer pour leurs travaux sur la réduction de la pauvreté dans le monde.
Les travaux conduits par les lauréats « ont introduit une nouvelle approche (expérimentale) pour obtenir des réponses fiables sur la meilleure façon de réduire la pauvreté dans le monde », a annoncé à Stockholm le secrétaire général de l’Académie royale des sciences, Göran Hansson.
Au milieu des années 90, Michael Kremer, 54 ans, professeur à l’Université d’Harvard, a « démontré à quel point cette approche peut être puissante en utilisant des expériences de terrain pour tester diverses interventions susceptibles d’améliorer les résultats scolaires dans l’ouest du Kenya », explique l’Académie.
Mariés à la ville, Abhijit Banerjee et Esther Duflo ont ensuite réalisé des études similaires sur d’autres questions et dans d’autres pays. Leurs méthodes de recherche expérimentale dominent désormais l’économie du développement. Esther Duflo, 46 ans, professeure d’économie au Massachusetts Institute of Technology (MIT), où exerce également son époux, est l’une des économistes les plus célébrées dans le monde, notamment aux Etats-Unis. Récipiendaire en 2010 de la médaille John Bates Clark, elle est seulement la seconde femme à recevoir le prix Nobel d’économie. Ses travaux lui avaient valu en 2013 d’être choisie par la Maison Blanche pour conseiller le président Barack Obama sur les questions de développement, en siégeant au sein du nouveau Comité pour le développement mondial.
Dernier né des Nobel, le « prix de la Banque de Suède en sciences économiques en mémoire d’Alfred Nobel » a été créé en 1968 pour célébrer les 300 ans de la Banque de Suède. Il avait été attribué en 2018 aux Américains William Nordhaus et Paul Romer qui ont décrit les vertus et nuisances de l’activité économique sur le climat. Après une édition 2018 funestement exceptionnelle du fait du report du prix de littérature, la saison Nobel 2019 n’aura guère soulevé de passions ni suscité de polémiques par-delà la consécration de l’écrivain autrichien Peter Handke.
L’auteur de « L’Angoisse du gardien de but au moment du penalty » est honni dans une partie des Balkans pour ses positions pro-Serbes et sa présence en 2006 aux funérailles de l’ex-président yougoslave Slobodan Milosevic, accusé de crimes contre l’humanité et génocide.
Son prix a relancé un débat ancien, récurrent en France avec le cas Céline, sur la séparation entre l’oeuvre d’un écrivain et son engagement politique. Sommé d’y répondre, le président du comité Nobel de l’Académie suédoise qui décerne le prix l’a tranché d’une formule: « Handke n’est pas un écrivain politique ».
Comme attendu par la critique, le prix de littérature 2018 reporté d’un an après un scandale d’agressions sexuelles en plein mouvement #MeToo est revenu à une femme, la Polonaise Olga Tokarczuk.
L’Académie suédoise, laminée par cette affaire dans laquelle un Français marié à une académicienne a été condamné à deux ans et demi de prison pour viol, n’avait qu’un objectif en tête cette année: faire le moins de vagues possible et revenir au « style » alors que les devanciers d’Olga Tokarczuk et Peter Handke avaient froissé les défenseurs des belles lettres, Bob Dylan (2016), trop « pop » et pas assez littérateur à leurs yeux, Kazuo Ishiguro (2017), trop « grand public ».
Annoncé à Oslo, le prix de la paix a opté pour un choix dit « classique » avec le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed, artisan d’une réconciliation spectaculaire avec l’ex-frère ennemi érythréen. Enfin si l’on excepte le prix de littérature à Olga Tokarczuk, attribué pour 2018, une seule femme a été primée cette année.
Chaque Nobel consiste en une médaille d’or, un diplôme et un chèque de neuf millions de couronnes suédoises (environ 830.000 euros).
Afp