Les Américains ont exercé des pressions pour la vente de 8,8 milliards de dollars d’actifs à Total en Algérie et dans toute l’Afrique. C’est ce qu’a révélé l’expert en énergie Toufik Hasni dans un entretien accordé à Sputnik.
« Par le biais de Total, ils s’assurent que leur marché restera dans la sphère du dollar et qu’ils continueront, ainsi, à imposer leurs prix. Total doit se plier aux injonctions américaines si elle veut maintenir ses marchés dans le pays de l’oncle Sam, où elle possède des actifs estimés à 10 milliards de dollars et dont les banques sont impliquées à 90% dans ses opérations financières. Nous avons vu, l’an dernier, comment ce super major français avait été poussé par la pression américaine à se retirer de ses chantiers gaziers en Iran. Total ne peut pas se soustraire à la volonté des États-Unis.», a-t-il déclaré dans ce sens.
Il rappelle qu’à l’instar d’autres entreprises américaines, Anadarko a cédé ses actifs en Europe et en Afrique, et non pas uniquement en Algérie. Le 6 septembre, Total a d’ailleurs annoncé avoir racheté la participation du groupe américain Anadarko dans un projet de gaz naturel liquéfié au Mozambique. Au-delà de la vente de ses actifs à l’étranger, Anadarko Petroleum, qui faisait face à d’énormes difficultés financières, a été rachetée en mai dernier par son compatriote Occidental Petroleum. Une transaction qui s’est faite après une bataille avec l’autre major américaine Chevron. Cette dernière fait elle-même face à une incapacité de paiement de ses dividendes jusqu’à 2022 en raison du problème de pénurie de liquidités que j’évoquais plus haut.
Concernant le nouveau projet de loi sur les hydrocarbures, M Hasni estime que tant qu’il n’ya pas encore le texte final de ce projet de loi, il ne peut se prononcer que sur la conjoncture de sa présentation. « J’estime qu’il est inopportun de voter une loi à un ou deux mois de l’élection présidentielle et que ce projet de loi n’augmentera en rien l’attractivité du marché pétrolier algérien. Ce, pour trois raisons », a-t-il déclaré.
Selon lui, sur le plan interne, voter une loi dans un secteur aussi sensible à la veille de la présidentielle représente pour les investisseurs étrangers un facteur de grand risque.
Pour ec qui est du marché pétrolier, MHasni précise que l’Algérie subit les contraintes du marché international des hydrocarbures au même titre que les autres pays producteurs de pétrole.
«Les déterminants dans la structure des prix ne sont plus les facteurs de l’offre et la demande depuis que les États-Unis sont devenus les premiers producteurs de pétrole en 2015. Ce sont désormais eux et leur allié, l’Arabie saoudite – premier pays producteur de l’Opep avec plus de 10 millions de barils par jour (mbj) – qui déterminent l’orientation des cours du brut. Aucun pays ne peut les concurrencer aujourd’hui! Le cours actuel du pétrole – qui ne dépasse pas les 60 dollars le baril du Brent – est la résultante d’une volonté stratégique du Président américain Donald Trump. Celui-ci veut contenir les hydrocarbures au prix le plus bas pour maintenir la dominance du dollar, car c’est le seul secteur où les États-Unis ne sont pas concurrencés par la Chine. Ceci explique que l’hôte de la Maison-Blanche adopte plutôt une stratégie de marché qu’une stratégie de prix. C’est pour cela que les cours du brut n’ont pas été affectés par un événement aussi important que l’attaque contre les installations saoudiennes d’Aramco », a-t-il précisé.
S’agissant des prévisions pour les années à venir, elles annoncent, selon lui, un prolongement de la domination des États-Unis sur le marché pétrolier, dont l’offre dépassera les12 mbj à partir de 2020 (contre environ 11 mbj aujourd’hui). Les États-Unis domineront également le marché gazier, en particulier celui du gaz naturel liquéfié GNL, dont ils sont les troisièmes fournisseurs derrière l’Australie et le Qatar. Certaines prévisions les donnent même numéro un du marché du GNL à partir de 2024.