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Chine et Etats-Unis, le risque de la « grande fracture » planétaire

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A la tribune de l’ONU, le ton du chef de la diplomatie chinoise Wang Yi est ferme et son regard noir. « La Chine ne sera jamais effrayée par les menaces ni ne pliera devant les pressions », martèle-t-il à l’intention des Etats-Unis.

L’Assemblée générale des Nations unies, toute la semaine à New York, a été une fois de plus le théâtre de cette « grande fracture » qui guette le monde, pour reprendre les mots de l’hôte de la grand-messe diplomatique annuelle, Antonio Guterres.

Soixante-dix ans après sa naissance, la Chine communiste affirme plus que jamais son statut de grande puissance antagoniste des Etats-Unis, eux-mêmes engagés dans une offensive inédite pour conserver leur suprématie.

Quand Wang Yi dénonce vendredi « pressions » et « menaces », il évoque la guerre commerciale engagée par Donald Trump et met en garde contre le risque qu’elle « plonge le monde dans une récession ». Il répond en fait au président américain qui, devant le même parterre de dirigeants des 193 pays de la planète, avait attaqué trois jours plus tôt les « abus » de Pékin.

Le gouvernement du milliardaire républicain a repris, en les amplifiant jusqu’à en faire un axe fondamental de son mandat, les accusations américaines de concurrence déloyale chinoise, voire d’espionnage industriel. « Pendant des années, ces abus ont été tolérés, ignorés, voire encouragés », a déploré le chantre de l’America First, l’Amérique d’abord. « Ces jours sont révolus ! »

Les puissances rivales mènent depuis de longs mois des négociations commerciales ponctuées d’escarmouches et de trêves. Toutefois, alors qu’il s’engage dans la campagne pour sa réélection, Donald Trump laisse désormais entendre qu’un accord pourrait ne pas être possible avant le scrutin de 2020. Mais derrière ce bras de fer qui fait tousser les marchés et nourrit les gros titres des médias, la confrontation est en fait généralisée.

Cette « grande fracture », redoutée par Antonio Guterres, a été décrite par le secrétaire général de l’ONU à l’ouverture des débats: « Une planète divisée en deux, qui verrait les deux plus grandes puissances économiques asseoir leur pouvoir sur deux mondes séparés en compétition, chacun avec sa devise dominante, ses propres règles commerciales et financières, son propre internet et sa propre intelligence artificielle, et ses propres stratégies géopolitiques et militaires dans un jeu à somme nulle ». De fait, si Washington a fait du Venezuela son ennemi régional, de l’Iran sa bête noire au Moyen-Orient et de la Russie son adversaire transatlantique, le chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo ne le cache pas : sur le long terme, la vraie rivalité stratégique est celle qui l’oppose à Pékin.

L’administration Trump a donc lancé une offensive tous azimuts, au parfum de guerre froide. C’est le vice-président Mike Pence qui a détaillé cette charge lors d’un réquisitoire d’une dureté inédite il y a exactement un an.

Outre le commerce, tout y passe : expansionnisme diplomatique et militaire, atteintes massives aux libertés publiques et aux minorités religieuses.

Le gouvernement républicain n’est pas forcément isolé sur la question. A Washington, une bonne partie des élus, des diplomates et des sinologues, toutes tendances confondues, s’accordent pour dire que l’espoir ancien de voir la mondialisation « normaliser » la Chine, en apportant démocratie et libertés en même temps que la prospérité économique, a fait long feu. Mais certaines critiques rappellent que les initiatives américaines pour contrer l’influence chinoise font suite au retrait du traité de libre-échange transpacifique, dont c’était justement l’objectif. Donald Trump a jeté le texte aux orties dès son arrivée à la Maison Blanche.

La semaine onusienne fut un observatoire privilégié de ce face-à-face. D’ordinaire si prompt à flatter son « ami » Xi Jinping, Donald Trump a lancé un avertissement inédit dans sa bouche au président chinois sur la crise politique à Hong Kong. « La manière dont la Chine va décider de gérer la situation en dira long sur son rôle dans le monde à l’avenir », a-t-il prévenu, appelant « fermement » au respect des engagements de Pékin en faveur de la « liberté » et de la « démocratie » dans l’ex-colonie britannique. Parallèlement, les autorités américaines sanctionnaient des sociétés chinoises pour violation de l’embargo sur le pétrole iranien, comme elles l’ont déjà fait concernant le blocus imposé à la Corée du Nord. Enfin, le département d’Etat américain a profité de l’Assemblée générale pour tenter de mobiliser la communauté internationale contre « l’horrible campagne de répression » des autorités chinoises à l’égard des musulmans ouïghours dans le Xinjiang.

Pékin a balayé les accusations et dénoncé, une fois de plus, « l’ingérence » des Américains.

Afp

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