A huit jours du premier tour de l’élection présidentielle, la Tunisie organise à partir de samedi et sur trois soirées un grand débat entre les 26 candidats, une initiative démocratique inédite dans le monde arabe. Présentée par ses promoteurs comme « l’événement » de la campagne électorale et comme un « tournant » dans la vie politique tunisienne, l’opération mobilise depuis des semaines les médias audiovisuels publics et privés, ainsi qu’une ONG spécialisée dans le débat politique.
Les 26 candidats ont été répartis en trois soirées : 9 samedi, 9 dimanche et 8 lundi, pour des émissions de deux heures et demie chacune. Solennellement intitulée : « La route vers Carthage. La Tunisie fait son choix » l’émission sera diffusée sur onze chaînes de télévision dont deux publiques, et une vingtaine de radios. « On ne pourra pas y échapper », s’amuse Belabbes Benkredda, fondateur de L’Initiative Munathara, l’ONG partenaire de l’opération.
Samedi soir, parmi les « poids lourds » ou les plus connus de la première émission, figureront le candidat islamiste Abdelfattah Mourou, le premier président de la Tunisie post-révolutionnaire Moncef Marzouki, l’ancien Premier ministre Mehdi Jomaa, la pasionaria anti-islamiste Abir Moussi, ou encore… une chaise vide pour l’homme d’affaires controversé Nabil Karoui, candidat en prison pour blanchiment d’argent. Sa participation au débat par téléphone depuis sa cellule a été envisagée par les organisateurs, mais la décision revient à la justice tunisienne.
Le plateau, installé dans les locaux de la Wataniya, la chaîne publique tunisienne, est organisé en forme de demi-cercle autour duquel les places des candidats ont été tirées au sort et au milieu duquel officieront deux journalistes modérateurs. Les questions, dont le nombre n’a pas été précisé, ont été élaborées par des journalistes et tirées au sort vendredi soir, ainsi que les candidats à qui elles seront posées. Chaque postulant aura 90 secondes pour répondre et pourra être relancé ou interrompu. A la fin de l’émission, il aura 99 secondes pour exposer les grandes lignes et les promesses de sa candidature. Au total, les candidats disposeront d’un quart d’heure de temps de parole au cours de l’émission.
Au-delà des aspects organisationnels et techniques, les organisateurs insistent tous sur le caractère sans précédent de l’opération. « Souvent dans le monde arabe, quand on parle compétition on sait qui gagne à la fin d’avance, avec 99,99 %. Aujourd’hui on ne sait pas qui va gagner », souligne M. Khedder. De fait, la présidentielle tunisienne, avec son nombre pléthorique de candidats, des programmes et des enjeux parfois difficiles à cerner, est marquée par l’imprévisibilité. Et de nombreux Tunisiens affirment compter sur le grand débat pour se déterminer. D’autant que cette émission sera aussi rediffusée sur des chaînes en Irak, en Algérie en Libye. Les organisateurs espèrent ainsi « un premier pas qui servira d’inspiration dans le monde arabe »
Afp