Transport, énergie, immobilier… A coup de milliards de dollars, les pays africains ont entrepris depuis quelques années de combler leurs retards dans le secteur des infrastructures. Aujourd’hui, le secteur longtemps considéré comme le principal frein au développement de l’Afrique, s’impose de plus en plus comme un nouveau levier de sa croissance. Et la multiplication des projets infrastructurels enregistrée à travers le continent ces dernières années, semble confirmer la tendance. Dans chaque région du continent, on assiste au lancement ou à la résurrection de mégaprojets. Visite de cinq chantiers emblématiques.
En Afrique centrale, le pont Kinshasa-Brazzaville renaît de ses cendres/ Le 07 novembre 2018, le ministre de l’Aménagement de la République du Congo Jean-Jacques Bouya, annonçait la conclusion d’un accord de 550 millions $ entre son pays et la RDC. Ledit accord visait à réaliser l’un des plus vieux projets infrastructurels du continent africain en matière d’intégration : le pont Kinshasa-Brazzaville. Prévu pour enjamber le fleuve Congo séparant les deux capitales les plus proches du monde, sur environ 1575 mètres, l’infrastructure dont le projet a été laissée à l’abandon pendant des années, a retrouvé un coup d’éclat sous l’initiative de la BAD. Cette dernière a d’ailleurs annoncé qu’elle financerait le projet à hauteur de 210 millions $ tout en indiquant que les travaux devraient démarrer en août 2020.
La nouvelle infrastructure comportera une voie de chemin de fer unique, une route à deux voies, des trottoirs et un poste-frontière à chaque extrémité, et sera connecté à l’infrastructure routière existante sur chacune des rives du fleuve Congo. Une fois achevé, il facilitera le développement de zones économiques spéciales, de part et d’autre du nouveau pont, et stimulera les échanges humains et économiques entre les deux villes et les deux pays. Il devrait également permettre de réduire les risques et coûts liés aux seuls moyens de transport disponibles actuellement pour passer d’une capitale à l’autre (bateaux, avions). Grâce au projet, le trafic actuel entre les deux capitales, estimé à 750 000 personnes et à 340 000 tonnes de fret par an, devrait passer à plus de 3 millions de personnes et à 2 millions de tonnes de fret d’ici à 2025.
En Egypte, la pharaonique « Sissi City » sort de terre : En 2015, le président égyptien Abdel Fattah Al-Sissi annonçait son intention de bâtir une nouvelle ville, présentée comme la future capitale du pays des pharaons. Annoncée pour un coût initial de 43 milliards d’euros, il vise à faciliter le désengorgement de l’actuelle capitale Le Caire, qui compte plus de 18 millions d’habitants. En cours de construction en plein désert, à 45 km à l’est du Caire, la nouvelle capitale administrative égyptienne compte un grand nombre d’infrastructures. En mars 2018, 390 kilomètres d’autoroutes ont été construits. Sur plus de 700 km², la ville est prévue pour compter environ dix mille kilomètres de voies nouvelles. 663 infrastructures de santé devraient y être construites ainsi que sept cents écoles maternelles et garderies et un parc à thème. Outre de très nombreux logements, non seulement de haut de gamme mais aussi plus modestes afin d’accueillir tous les fonctionnaires du nouvel ensemble, le projet compte des hôtels de luxe, un nouvel aéroport et une tour de 345 mètres. La nouvelle mégalopole est prévue pour accueillir environ six millions et demi d’habitants, répartis sur vingt-et-un districts résidentiels, à une échéance de vingt ans environ.
La centrale d’Essakane, plus grande centrale hybride thermique-solaire du monde : En mars 2018, le Burkina Faso inaugurait un projet énergétique exceptionnel. A Essakane, la plus grande centrale hybride thermique-solaire du monde entrait en service. Composée de 130 000 panneaux solaires, reliés à la centrale existante au fioul lourd de 57 MW, le projet vise à alimenter en électricité la mine d’or d’Essakane, située dans le nord du pays. Dans un contexte marqué par l’intensification de la lutte contre le changement climatique, la construction de cette centrale constitue un pas majeur franchi dans la promotion des énergies renouvelables. D’après le groupe Total, l’infrastructure permettra de réduire la consommation de carburant de la mine d’Essakane de quelque 6 millions de litres par an, ainsi que ses émissions annuelles de CO2 de près de 18 500 tonnes.
Une ligne électrique à 1,26 milliard $ entre le Kenya et l’Ethiopie : Prévu pour entrer dans sa phase opérationnelle avant la fin de cette année, la ligne électrique devant relier le Kenya à l’Ethiopie a été lancée en 2013 par la BAD qui la cofinance. S’étendant sur 1068 km, elle est composée de deux lignes de transport d’électricité sur une distance de quelque 437 km en Ethiopie et 631 km environ au Kenya, ainsi que des installations connexes, à Wolayta-Sodo (Ethiopie) et Suswa (Kenya). En plus d’assurer l’accès à l’énergie fiable et abordable à des centaines de milliers de ménages, elle permettra de renforcer les échanges transfrontaliers entre les deux pays. Elle offrira également aux pays disposant d’une capacité de production d’électricité excédentaire, comme c’est le cas de l’Ethiopie, une vraie opportunité de générer des revenus. A terme, la ligne devrait être capable de transporter 2000 MW d’électricité, contre un objectif initial de 400 MW.
Le corridor logistique de Nacala : En 2017, le Mozambique inaugurait le corridor logistique de Nacala. Pour un coût de plus de 4 milliards $, l’infrastructure vise à transporter du charbon depuis la province occidentale de Tete, jusqu’au Terminal portuaire de Nacala, sur environ 900 km de voie ferrée, en s’étendant au Malawi. Le port, qui entend concurrencer celui de Durban en Afrique du Sud et celui de Mombasa au Kenya, a été réalisé grâce à l’appui des groupes Vale et Mitsui qui en détiennent chacun 35% des parts. « Ce projet contribue sans conteste à l’unification du continent et permet au Malawi, un pays enclavé, d’exporter ses ressources minières. Il doit servir d’exemple à d’autres projets d’infrastructures transfrontalières en Afrique » indiquait à cet effet Henri Epessé, conseiller de la direction chez Eneo.
Ecofin