L’ancien chef du gouvernement Mouloud Hamrouche sort enfin de son silence et encense, à demi voix, le rôle de l’armée nationale dans la gestion de la crise politique que connaît le pays depuis le mouvement de contestation. Il a qualifié, ce lundi, dans une contribution publiée par le quotidien El Watan, de « révolte pacifique et austère contre le système » le mouvement populaire.
« Par son ampleur unitaire, le mouvement a évité à l’armée d’intervenir et de garder sa cohésion intacte. Ensuite avec l’évolution de la situation au sein du sérail, l’armée a pris naturellement et formellement position avec le peuple », a-t-il écrit dans la contribution.
« Ce qui lui permet de ne pas être en contradiction avec son statut d’armée nationale et de ne pas être une cible fragile à détruire par d’autres puissances étatiques étrangères, particulièrement méditerranéennes ou de l’OTAN, à l’instar de celles de l’Irak, de la Libye et de la Syrie », a-t-il précisé.
Pour M. Hamrouche, « l’ordre mondial et ses puissances étatiques ne s’accommodent jamais de la présence d’une armée puissante qui échappe à des contrôles constitutionnels, institutionnels et des lois d’un contrôle rigoureux en termes de fonctionnement, d’emploi et d’utilisation. Encore moins si elle est mise au service ou à la disposition d’un omnipotent pour servir d’outil de gouvernement et de répression ou d’instrument de pression et de chantage aux voisinages ».
L’ancien premier ministre estime que « seules des armées nationales soumises à contrôle institutionnel et constitutionnel et assujetties à l’obligation de l’Etat et à son contrôle ont un droit d’exister et d’établir des relations internationales et être intégrées dans le système mondial de paix, de maintien de l’ordre et de stabilisation régionale ».
En rejoignant le peuple dans ses revendications légitimes, le commandement a, selon M. Hamrouche, su sauvegarder le statut national de l’armée. « Il lui reste à contribuer au parachèvement de l’édification de l’Etat national par la mise en place d’une Constitution et d’institutions de vrais pouvoirs d’autorisations, de régulations, d’habilitations et de contrôles. Cela mettra l’armée définitivement à l’abri des conflits politiques partisans, permettra de servir de base politique au gouvernement ou d’être un outil entre les mains d’un omnipotent », a-t-il proposé.
Il serait fâcheux de croire que l’édification de l’Etat ne servira qu’à abriter l’armée nationale et la préserver de toute turpitude. Cette édification servira aussi à ancrer la démocratie et la faire fonctionner, ouvrir le gouvernement à la compétition et à l’alternance sans remise en cause des fondements de l’Etat et du rôle de l’armée, ni perturber le système de défense et de sécurité nationale, ni remettre en cause ou négliger nos devoirs et engagements internationaux.
« Des habitudes et des pratiques de fraude enracinées »
L’ancien premier ministre a par ailleurs dénoncé « des habitudes et des pratiques de fraude enracinées constituent le soubassement du système algérien. La cooptation et la délégation de l’exercice du pouvoir lui permettent de s’adapter, survivre aux hommes et à ses crises de régénérescence ».
Il a également critiqué « un multipartisme de façade et de connivence » qui, selon lui, ne structure jamais un débat national ni un ordonnancement des rapports sociaux et politiques. Il ne permet pas non plus de gouverner et d’obtenir adhésions et soutiens réels ».
Selon lui, ce multipartisme de façade « n’améliore en rien le fonctionnement de la gouvernance, il ne renforce ni la place de l’opposition ni offre d’alternatives. Pire, il ne fait que se nourrir de fiction électorale, organique et organisationnelle. Ces fictions ôtent toute espèce de représentativité, de représentation et privent toute politique de tout contenu et de toute possibilité de mise en œuvre ».