Le chef de l’ONU a réclamé mardi plus de 4 milliards de dollars pour l’aide humanitaire au Yémen en 2019, tandis que des humanitaires accédaient pour la première fois en six mois à des entrepôts de céréales près de la ligne de front de Hodeida, dans l’ouest du pays.
A la mi-journée, Antonio Guterres a annoncé que sur les 4,2 milliards de dollars (3,7 milliards d’euros) demandés, près de 2,6 milliards de promesses de financement avaient été annoncées lors de la conférence des donateurs à Genève. Cette aide devrait permettre aux différentes agences des Nations unies de venir en aide cette année à 21,4 millions de personnes, soit 70% de la population. « La conférence des donateurs d’aujourd’hui peut être considérée comme un succès. Les donateurs se sont engagés à verser 30% de plus que l’an dernier », s’est réjoui M. Guterres, lors d’un point de presse. « Plusieurs pays ont augmenté leur contribution », surtout l’Arabie saoudite et les Emirats arabes unis, a-t-il spécifié, estimant qu’il n’y avait pas de conflit d’intérêt entre les dons faits par ces pays à l’ONU et leur participation au conflit.
Depuis mars 2015, l’Arabie saoudite a pris la tête d’une coalition pour soutenir le gouvernement yéménite face aux rebelles Houthis soutenus par l’Iran.
Le gouvernement saoudien a annoncé une contribution de 500 millions de dollars au plan d’aide de l’ONU. L’UE a promis, elle, 161,5 millions d’euros. « Indépendamment du rôle qu’un pays peut jouer dans un conflit, il y a des besoins humanitaires et nous avons tous l’obligation de soutenir la réponse à ces besoins humanitaires », a soutenu le chef de l’ONU, précisant que l’aide était distribuée en toute « impartialité, neutralité et indépendance ». Mais pour Médecins sans frontières (MSF), la crise humanitaire au Yémen est « alimentée par l’implication des principaux gouvernements donateurs dans le conflit ». Dans un communiqué, l’ONG a dénoncé « les restrictions sur les importations, les visas et les permis de circulation » qui créent « des obstacles empêchant une distribution équitable de l’aide ».
Le conflit a déjà fait quelque 10.000 morts, selon un bilan partiel de l’Organisation mondiale de la santé. Selon l’ONU, 24,1 millions de Yéménites ont besoin d’une aide ou de protection, dont 10 millions sont au bord de la famine. « Un rapport crédible indique que le nombre d’enfants de moins de 5 ans qui sont morts de faim s’élève à plus de 80.000 », a souligné M. Guterres, devant les diplomates.
Le Programme alimentaire mondial (PAM) espère, lui, venir en aide cette année à 12 millions de personnes par mois au Yémen, alors qu’il en atteignait entre 7 à 8 millions à la fin de 2018. « Le Yémen reste la pire crise humanitaire au monde », selon le secrétaire général adjoint pour les Affaires humanitaires de l’ONU, Mark Lowcock. Et « la situation s’est détériorée depuis l’année dernière à la même époque », a-t-il dit à des journalistes lundi.
La conférence des donateurs sur le Yémen a coïncidé avec l’arrivée d’une mission d’évaluation du PAM dans les entrepôts de Red Sea Mills, dans la région de Hodeida, une première en six mois. « Une bonne nouvelle » pour le chef de l’ONU. « Aujourd’hui, pour la première fois depuis septembre, une équipe du Programme Alimentaire Mondial a pu accéder au site Red Sea Mills qui abrite 51.000 tonnes de céréales, une quantité suffisante pour nourrir plus de 3,7 millions de personnes pendant un mois », a détaillé à l’AFP un porte-parole du PAM, Herve Verhoosel.
Cette mission fait suite à l’accord du 17 février conclu entre belligérants au Yémen en faveur d’un redéploiement de combattants hors de trois ports dans le pays, sous l’égide de l’ONU. Cet accord, qui confirme une entente conclue début décembre en Suède entre les belligérants, prévoit un redéploiement « dans un premier temps » hors des ports de Saleef et Ras Isa, suivi dans « un deuxième temps » d’un repli hors de la ville portuaire de Hodeida.
Situés dans l’ouest du Yémen, ces ports sont sous le contrôle des rebelles Houthis. L’application de l’accord doit s’accompagner d’une liberté d’accès aux entrepôts à grains de Red Sea Mills, qui eux sont sous contrôle des forces gouvernementales.
Afp