L’ex-patron du groupe LafargeHolcim, Eric Olsen, a été mis en examen jeudi soir dans l’enquête sur le financement par le cimentier en 2013 et 2014 de plusieurs groupes jihadistes en Syrie, dont l’Etat islamique (EI), a-t-on appris de source judiciaire.
Eric Olsen, 53 ans, DRH puis directeur général adjoint du groupe français Lafarge à l’époque des faits, avant de devenir directeur général après la fusion avec le Suisse Holcim, a été mis en examen pour « financement d’une entreprise terroriste » et « mise en danger de la vie d’autrui » et placé sous contrôle judiciaire, a précisé cette source.
Il avait été placé en garde à vue mercredi avec deux autres ex-responsables du groupe: Bruno Lafont, PDG de Lafarge de 2007 à 2015, et Christian Herrault, ancien directeur général adjoint chargé de plusieurs pays dont la Syrie.
Les gardes à vue de MM. Lafont et Herrault sont toujours en cours, a précisé la source judiciaire.
Le cimentier est mis en cause notamment pour avoir acheté du pétrole à l’EI, en violation de l’embargo décrété par l’Union européenne en 2011, et pour lui avoir remis de l’argent via un intermédiaire, afin de continuer à faire tourner son usine de Jalabiya (nord du pays).
De juillet 2012 à septembre 2014, la filiale syrienne (Lafarge Cement Syria, LCS) a versé environ 5,6 millions de dollars à diverses factions armées dont plus de 500.000 dollars à l’organisation d’Abou Bakr al-Baghdadi, d’après un rapport du cabinet américain Baker McKenzie.
Il est aussi reproché à LCS de ne pas avoir assuré la sécurité de ses employés syriens, restés seuls sur place alors que la direction de l’usine avait quitté la Syrie à l’été 2012.
Le 1er décembre, trois anciens cadres, dont deux ex-directeurs de l’usine de Jalabiya, ont été mis en examen.
Les enquêteurs cherchent à savoir si la direction en France était au courant de la situation.
Eric Olsen assistait aux réunions du comité de sûreté et a « participé pleinement aux discussions concernant la sécurité de l’usine LCS », soulignait le cabinet Baker McKenzie.
Et Christian Herrault, qui a reconnu début 2017 que le groupe avait été victime d’une « économie de racket », a assuré « avoir régulièrement informé Bruno Lafont » et que ce dernier « n’avait émis aucune objection à l’époque », d’après ce document.
Le scandale a éclaté en 2016, un an après la fusion avec Holcim.
Eric Olsen, nommé directeur général de LafargeHolcim en avril 2015, a démissionné deux ans plus tard, tandis que Bruno Lafont n’a pas sollicité le renouvellement de son mandat d’administrateur et a aussi quitté la société.
Sollicité, LafargeHolcim a indiqué qu’il « ne souhaitait pas commenter l’enquête en cours ».
Afp