La production industrielle et les ventes au détail en Chine ont ralenti plus qu’attendu en octobre, la deuxième économie mondiale montrant des signes d’essoufflement à l’heure où Pékin s’efforce d’endiguer plus drastiquement la pollution et les risques financiers liés à sa dette.
La production industrielle du géant asiatique a progressé de 6,2% le mois dernier, a annoncé mardi le Bureau national des statistiques (BNS), après une hausse de 6,6% en septembre. La progression d’octobre est inférieure à celle attendue par les analystes sondés par l’agence Bloomberg News (+6,3%).
« Le refroidissement du secteur immobilier », frappé de restrictions dans les grandes villes, « et un affaiblissement de la demande internationale pèsent sur l’économie », tandis qu’une campagne anti-pollution perturbe la production, observe Julian Evans-Pritchard, analyste du cabinet Capital Economics.
Le régime impose aux groupes industriels de sabrer leurs capacités de production excédentaires pour réduire les émissions polluantes durant les mois d’hiver, un objectif environnemental devenu prioritaire aux yeux de Pékin et qui devrait, selon les experts, pénaliser l’activité au quatrième trimestre.
Pékin avait déjà fait état pour octobre d’un net essoufflement de l’activité manufacturière.De leur côté, les ventes au détail — baromètre de la consommation des ménages chinois — n’ont guère mieux résisté, selon le BNS.
Elles ont affiché un ralentissement inattendu le mois dernier, gonflant de 10% sur un an, contre un bond de 10,3% en septembre et très en deçà des prévisions, les analystes ayant misé sur une accélération (10,5%). « La Chine est à une étape décisive de la transformation de son modèle de croissance et de ses structures économiques (…) Les problèmes de déséquilibres de développement restent aigus », a reconnu la porte-parole du BNS, Liu Aihua, tout en saluant « une performance économique stable ».
Maintenant que le crucial congrès quinquennal du Parti communiste au pouvoir (organisé à la mi-octobre) est passé, « nous assistons à un tournant de politique économique », abondait Shen Jianguang, analyste de Mizuho Investment, cité par Bloomberg. Après s’être efforcées de préserver l’activité en vue du congrès, les autorités en reviennent désormais à « la lutte contre l’endettement et les risques financiers », notait-il.
Le président Xi Jinping, récemment reconduit à la tête du régime communiste pour cinq ans, avait rappelé mi-octobre son objectif de passer d’un modèle de croissance accélérée — dopé par les exportations et une industrie lourde adossée à l’État –, à un modèle « qualitatif » privilégiant l’environnement, l’innovation technologique et le désendettement.
La dette chinoise privée et publique totale, hors secteur financier, avoisinait 235% du produit intérieur brut (PIB) fin 2016 et pourrait dépasser 290% d’ici à 2022, selon le Fonds monétaire international (FMI), qui met en garde contre les dangers financiers liés à une économie toujours largement dopée au crédit.
Au pied du mur, Pékin s’efforce de dégonfler les créances douteuses de ses banques, d’intensifier sa campagne contre la « finance de l’ombre » — des instruments de crédits non régulés — et de restructurer les groupes étatiques les plus fragiles ne survivant que grâce aux subsides des autorités. Dans ce contexte, les analystes s’attendent à voir se modérer les mesures de relance et dépenses publiques.
Les investissements en capital fixe, jauge des dépenses dans les infrastructures, ont néanmoins gonflé de 7,3% sur un an sur la période janvier-octobre, selon le BNS, ne marquant qu’un léger ralentissement.
Enfin, la construction et l’immobilier, des piliers cruciaux de la croissance du géant asiatique, continuent de s’effriter: les investissements dans l’immobilier se sont à nouveau essoufflés en octobre à l’unisson des ventes d’appartements.
De nombreuses grandes villes ont sévèrement durci depuis l’an dernier les restrictions sur les achats de logements afin de contenir la flambée des prix.
La Chine a vu sa croissance économique accélérer à 6,9% au premier comme au deuxième trimestre, et progresser de 6,8% au troisième, se trouvant donc en bonne voie de surpasser sa performance de 2016 (+6,7). Pour autant, les statistiques de mardi confirment que la croissance chinoise en a terminé avec son rebond cyclique des trois premiers trimestres et reprend désormais en fin d’année sa tendance baissière, insiste dans une note Yang Zhao, analyste de la banque Nomura.
Afp