Le président du collège national des experts architectes (CNEA), Abdelhamid Boudaoud, revient dans cet entretien, sur la tenue du salon batimatec prévu du 23 au 27 avril à Alger. Mr Boudaoud estime qu’il faut saisir la tenue de cette édition pour relancer le débat sur des sujets importants du secteur comme l’efficacité énergétique dans le bâtiment, le problème des constructions inachevées et celui du foncier, sans oublier les normes de construction.
Algérie-Eco : Le salon du bâtiment et des matériaux de construction Batimatec, n’a pas perdu sa cote auprès des professionnels du secteur malgré la conjoncture économique actuelle. L’édition de cette année prévue du 23 au 27 avril promet d’être à la hauteur des attentes des professionnels et des visiteurs. En tant qu’expert architecte, que représente pour vous cette manifestation ?
Abdelhamid Boudaoud : Le salon a toujours été une vitrine des entreprises du secteur qui veulent exposer leur savoir-faire et leurs produits. L’idée en elle-même est bien et est toujours la bienvenue car elle séduit soit le professionnel soit le visiteur. Comment ? me diriez-vous. Il faut connaitre les besoins des visiteurs dans ce sens. Ce dernier a surtout besoin qu’on lui présente un échantillon d’une construction, pour qu’il soit au courant de toutes les évolutions du secteur. Il faut aussi impliquer l’architecte dans ce sens. Tous les acteurs qui vont participer à ce salon soit de la Promotion Immobilière, matériaux de Construction, matériels, BTPH, TP, l’aménagement, doivent utiliser les meilleurs moyens pour se rapprocher des clients et des professionnels. Il faut dire aussi que l’édition de cette année intervient dans un contexte difficile marqué par l’entame d’une nouvelle stratégie de développement économique où le secteur de l’habitat et de la construction occupe une place importante.
La nouvelle édition du Batimatec va aussi consacrer dans son programme de conférences un volet pour l’environnement notamment l’éco- construction au moment où le sujet sur la sécurité du bâtiment et sur l’efficacité énergétique alimente l’actualité. Quel commentaire faites-vous à ce sujet ?
Je dirai simplement que nous sommes encore loin pour ce qui est de l’efficacité énergétique dans le secteur du bâtiment. Sonelgaz a certes mis en place un programme de l’efficacité énergétique qui consiste à réduire graduellement la consommation. Sa mise en œuvre générerait, selon l’entreprise, une économie d’énergie cumulée de l’ordre de 90 millions de tep, dont 60 millions sur la période 2015-2030 et 30 millions de tep, au-delà de 2030, pour la période correspondant à la durée de vie des équipements utilisés et des constructions réalisées. Ainsi, Il permettrait pour l’année 2030 de réduire la demande en énergie d’environ 10%. Quand ont dit efficacité énergétique du bâtiment, on parle de l’amélioration de l’isolation thermique des bâtiments, du développement du chauffe-eau solaire de la généralisation de l’utilisation des lampes à basse consommation etc… mais nous ne sommes pas encore prêts pour ça, parce que nous n’avons pas encore une architecture adaptée à ce genre d’initiative.
Je fais aussi le même constat pour ce qui est de la protection de l’environnement. Si vous vous souvenez bien, en 2005 ; on avait annoncé la suppression des sachets en plastiques noirs. On est en 2017 et les sachets existent toujours partout. Donc les idées sont la, mais le problème réside toujours dans leurs application. C’est le même cas pour le secteur du bâtiment. Malgré cela, nous les architectes, sommes optimistes pour la réalisation de ce programme énergétique dans le secteur du bâtiment.
Le salon Batimatec nous mène également à parler du problème des constructions inachevées. Le gouvernement a décidé d’accorder des délais supplémentaires à leurs propriétaires afin de leur permettre de régler leur situation, qu’en est-il réellement ?
Il faut savoir qu’à l’initiative du Collège national des experts architectes (CNEA) et du Conseil local de l’Ordre des architectes d’Alger (CLOA), une journée portes-ouvertes a été organisée en date du 15 mai 2016 au Bastion 23, portant sur les règles de mise en conformité des constructions illicites et leur achèvement, coïncidant avec la veille d’expiration du délai d’exécution de la loi 08-15 du 20 juillet 2008.
Cette rencontre entrait dans le cadre des activités permanentes des corps suscités, qui constituent, après concertation et dialogues, une force capitale pour émettre des avis, des propositions et recommandations, ayant pour objectif la présentation de solutions opérationnelles aux problèmes relevant du secteur. Il y a 1548 communes et chaque commune doit recenser son patrimoine inachevé et c’est à la commune d’interpeller les personnes qui ont des constructions inachevées.
Le wali, le président d’APC ainsi que les agents assermentés ou commissionnés doivent, à tout moment, visiter les constructions en cours, procéder aux vérifications qu’ils jugent utiles et se faire communiquer, à tout moment, les documents techniques se rapportant à la construction. La démolition de 1 200 000 bâtisses recensées sur le territoire national est inconcevable, voire dramatique par rapport aux dépenses excessives et abusives qu’elles soient privées ou étatiques, en consommant des milliers de tonnes de ciment et d’acier, qui se réduiront en poussière par un simple acte de démolition du jour au lendemain, pendant que la demande en logements est tragique et se fait ressentir de plus en plus.
Justement, Batimatec est une occasion pour relancer le débat sur le sujet et sensibiliser le maximum de gens concernés par cette problématique sur les contours de la loi. En plus, il y a le problème du foncier qui surgit. Il faut une décision politique dans ce sens sachant qu’il existe plusieurs cas qui n’ont aucun papier pour le titre de propriété.
Batimatec est également une occasion pour relancer le débat sur les normes de construction dont le sujet ne cesse d’être d’actualité vu que l’Algérie est exposée aux différentes catastrophes naturelles comme le séisme ou les inondations. Où on est-on pour ce qui est du respect des normes de construction ?
C’est la main sale qui tue et pas le séisme. Il faut dire que les études concernant les normes de construction sont faites. Mais est-ce qu’il ya un contrôle rigoureux des chantiers. Existe-il des laboratoires ambulants, y a-t-il des études de micro-zonage ? Autant de questions qui ne trouvent toujours pas de réponses. Chaque commune doit avoir une carte antisismique, et faire appel aux géologues avant le démarrage d’un projet de construction.