La Chine a vu ses exportations rebondir en mars à la faveur d’une demande mondiale robuste, ce qui lui a permis de renouer avec un net excédent de ses échanges, à l’heure où le risque de guerre commerciale avec l’Amérique de Donald Trump semble s’estomper.
Le géant asiatique, au coude-à-coude avec les Etats-Unis pour le titre de première puissance marchande du globe, a enregistré le mois dernier la plus forte hausse de ses exportations depuis deux ans: elles ont grimpé de 16,4% sur un an, à 180,6 milliards de dollars, selon des chiffres officiels.
C’est une reprise bien plus forte que prévu après le repli inattendu de 1,3% enregistré en février: la Chine avait alors accusé le premier déficit de sa balance commerciale en trois ans. A l’inverse, le pays a pu dégager en mars un excédent commercial de 23,9 milliards de dollars, a précisé jeudi l’administration des douanes. Une fois dissipées les distorsions dues au décalage calendaire du Nouvel an lunaire, « le déclencheur semble être un renforcement de la demande extérieure à la fin du trimestre », observe Julian Evans-Pritchard, analyste de Capital Economics.
En témoigne la forte hausse des échanges avec ses deux principaux partenaires commerciaux, l’Union européenne (UE) et les Etats-Unis –en dépit des menaces de droits de douane prohibitifs agitées par Donald Trump avant son accession à la Maison Blanche: les exportations vers les Etats-Unis ont progressé de 10% sur l’ensemble du premier trimestre, avec pour mars un excédent chinois de 17,7 milliards de dollars avec la première puissance économique mondiale. Une performance notable alors que le commerce extérieur de la Chine avait lourdement trébuché en 2016, avec un plongeon de 7,7% de ses exportations. « La Chine rattrape enfin le reste de l’Asie pour tourner la page de la récession commerciale », observe Raymond Yeung, analyste de la banque ANZ, cité par Bloomberg News
Par ailleurs, « le risque d’une guerre commerciale délibérée s’est estompé avec le sommet entre (le président chinois) Xi Jinping et (son homologue américain) Donald Trump », insiste ANZ dans une note, jugeant que les Etats-Unis doivent se montrer accommodants pour s’assurer le soutien de Pékin dans des dossiers géopolitiques.
De fait, M. Trump a estimé mercredi que « les Chinois ne manipulent pas leur monnaie »: un revirement complet de la part du milliardaire, qui accusait volontiers la Chine de sous-évaluer le yuan pour favoriser ses exportateurs.
Pour autant, « l’environnement reste compliqué par de nombreuses incertitudes et facteurs d’instabilité. Les difficultés perdureront sur le long terme », tempère Huang Songping, porte-parole des douanes, estimant que l’expansion du commerce extérieur chinois devrait s’enrayer au deuxième trimestre.
Le retour de la Chine à un excédent commercial s’explique non seulement par le rebond des exportations mais également par une modération sensible des importations. Celles-ci ont grimpé en mars de 20,3% sur un an, à 156,7 milliards de dollars, une hausse toujours conséquente mais très en-deçà de l’envolée de 38% du mois précédent. Là encore, la progression s’avère cependant supérieure aux attentes du marché.
Certes, la modération des importations en valeur reflète avant tout un reflux des prix des matières premières industrielles. Mais « la croissance des volumes importés s’est également ralentie », ce qui suggère que « l’embellie des importations alimentée par le récent sursaut de l’économie pourrait commencer à s’essouffler », avertit M. Evans-Pritchard.
Selon lui, le durcissement des restrictions dans l’immobilier et de la politique monétaire « commence à peser sur la demande intérieure ».
De grandes villes chinoises ont durci drastiquement les restrictions sur l’achat d’appartements afin d’enrayer une bulle jugée dangereuse, tandis que la banque centrale a entamé un durcissement du crédit, affolée par l’envolée de l’endettement national. Or, « l’immobilier et les investissements intérieurs sont les véritables moteurs de la croissance chinoise cette année, pas le commerce », observe-t-on chez ANZ, pour qui Pékin n’aurait pas intérêt à recourir à une « dévaluation massive » pour soutenir ses échanges
Afp