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Fleuron de la « nouvelle Ethiopie », le tramway d’Addis Abeba peine à convaincre

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Le tramway d’Addis Abeba est l’un des rares exemples d’infrastructure urbaine de transports collectifs sur un continent où les bus bringuebalants et pollueurs font la loi. Mais 14 mois après son entrée en fonction, il peine à convaincre les usagers.

Problèmes de conception du tracé, usure anormalement rapide entraînant pannes et retards, rames bondées dans une ville à la démographie galopante… le tramway n’a pas désengorgé les rues de la capitale éthiopienne. Et malgré un tarif légèrement avantageux sur les longs trajets, le réseau de minibus privés constamment surchargés reste l’unique option de nombreux habitants.

Zerayakob Assefa, retraité, attend une rame censée l’emmener en banlieue est. Mais quand le tramway arrive enfin, 15 minutes plus tard, il est tellement bondé qu’il ne peut monter à bord. Positif, M. Assefa trouve néanmoins que ce tramway, « c’est mieux que rien ». Plus loin, une passagère exaspérée s’extrait d’un wagon plein à craquer. Elle peste: « Je ne le prendrai plus jamais ».

Ouvert en septembre 2015 et largement financé par des fonds chinois, le premier tramway moderne d’Afrique sub-saharienne devait permettre de décongestionner la capitale du second pays le plus peuplé du continent. Et le projet a attiré l’attention d’autres capitales africaines, comme Lagos ou Nairobi, qui envisagent de lancer leur propre tramway.

Le gouvernement avait présenté le système de deux lignes, de 34 km de long, comme un fleuron de la « nouvelle Ethiopie » et un exemple des retombées de la forte croissance économique du pays, une des plus dynamiques du continent avec près de 10% en 2015, selon la Banque mondiale.

La croissance devrait certes ralentir en raison de la sécheresse et des manifestations anti-gouvernementales des derniers mois, qui ont ciblé les entreprises étrangères. Mais cela n’empêche pas le gouvernement du Premier ministre Hailemariam Desalegn de continuer à investir de l’argent dans des projets d’infrastructures construites par la Chine (barrages, terminaux d’aéroport, autoroutes…).

Le tramway a été assemblé par l’entreprise China Railway Engineering Corporation (CREC) et a coûté 475 millions de dollars, couverts à 85% par la banque chinoise Exim.

Le jour de son inauguration, des résidents enthousiastes avaient fait la queue pendant des heures pour être les premiers à l’utiliser. Mais ils constatent aujourd’hui qu’il n’a pas changé la donne autant qu’ils l’espéraient. Le tracé du tramway, qui relie le centre-ville à certains quartiers du sud et de l’est de la capitale, n’est pas assez étendu aux yeux des usagers.

Elias Kassa, un professeur en Sciences ferroviaires à l’université norvégienne de Science et technologie de Trondheim, estime que les planificateurs du tramway ont échoué à l’intégrer dans le système pré-existant de bus.

Les usagers doivent marcher de longues distances pour arriver aux stations et ensuite traverser des rues encombrées de véhicules pour passer du tramway au bus, une faille qui pourrait ébranler le réseau si elle n’est pas corrigée, selon M. Kassa.

Certains accusent même le tramway d’avoir aggravé les bouchons. Si par endroits, les rails sont surélevés, à d’autres ils coupent les routes, laissant des artères bloquées, maugrée Amin Ansar, chauffeur de minibus. « Dans les endroits où il y a des rails, ça a rendu le trafic pire, parce que vous ne pouvez pas traverser de l’autre côté (en voiture) », dit-il.

L’usure se fait aussi sentir, avec environ un tiers des 41 rames en réparation, ce qui ne fait qu’aggraver les retards et l’encombrement du réseau. « On ne peut pas dire qu’on résout le problème du transport », admet Awoke Mulu, un porte-parole de la société gérant le tramway, blamant la croissance démographique de cette capitale de 4 millions d’habitants dont la population pourrait tripler d’ici 2024, selon l’ONU.

Il note cependant que le tramway a déjà transporté 50 millions de personnes, et a eu un « impact positif », notamment pour les personnes à faibles revenus: se déplacer en tramway revient au pire au même prix qu’un trajet en bus (pour les trajets courts, autour de 0,10 dollar) et au mieux légèrement moins cher, notamment pour les longs trajets (0,30 dollar). Un argument pour ceux qui doivent compter le moindre birr, la monnaie éthiopienne.

« Le but était de répondre aux manquements du système de transport, surtout pour les gens aux revenus inférieurs », remarque aussi M. Kassa. « Si vous prenez ça en considération, je dirais qu’il a atteint son objectif, pas entièrement, mais dans une certaine mesure ».

Afp

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