Des casques aux contenus et aux outils les plus divers, les moyens de plonger dans la réalité virtuelle ne manquent pas au salon d’électronique CES de Las Vegas, mais elle montre encore peu de signes qu’elle va s’implanter rapidement dans la culture grand public.Que faire pour mettre la technologie, qui séduit jusqu’ici surtout les amateurs de jeux vidéo, dans les mains de Monsieur tout le monde ?
Shawn DuBravac, chef-économiste de l’association technologique américaine CTA qui organise le salon, se dit confiant que l’élargissement des usages possibles créera de la croissance dans le futur. « Il y a beaucoup d’investissements dans les contenus », souligne-t-il. « Les ventes vont finir par venir ».
HTC, l’un des principaux acteurs aujourd’hui sur le marché avec son casque Vive, a eu une bonne année 2016 mais n’a fait « vraiment qu’égratigner la surface », reconnaît Daniel O’Brien, qui supervise cette branche du groupe taïwanais.Ce dernier a profité du CES pour annoncer des initiatives censées encourager les développeurs à créer davantage d’applications pour la réalité virtuelle, et les consommateurs à l’utiliser.
HTC envisage d’avoir d’ici la fin de l’année des milliers de bornes d’arcade dédiées à la réalité virtuelle dans des centres commerciaux, des centres-villes ou d’autres endroits publics, ce qui permettrait à plus de gens de l’essayer.
La boutique d’applications en ligne du groupe, Viveport, devrait à la même échéance proposer plus de 3.000 titres, avec l’ambition de pouvoir servir toutes les plateformes de réalité virtuelle, y compris concurrentes.
Et HTC a évoqué au CES la possibilité d’y intégrer un service par abonnement, comparé à un « Netflix de la réalité virtuelle » et présenté comme une première mondiale. Là encore, l’idée est d’aider les développeurs de logiciels à toucher un public plus large et gagner de l’argent, ce qui idéalement les inspirerait à créer davantage de contenus.
Vive est en concurrence principalement avec le PlayStation VR de Sony et le Rift d’Oculus, une filiale de Facebook. Tous cherchent à attirer davantage d’utilisateurs en essayant de séduire les développeurs de logiciels et en améliorant leurs appareils. »Notre objectif est de construire la plus grande plateforme de réalité virtuelle du monde », affirme Daniel O’Brien. « 2016 a été le moment de la révélation pour la réalité virtuelle; 2017 est celui de développer le marché et de continuer à faire évoluer le produit ».
D’après lui, HTC prévoit de sortir plus tard cette année un appareil permettant de faire rentrer plus facilement des versions numérisées d’objets du monde réel dans des mondes virtuels. Il travaille aussi sur une version sans fil de son casque, pour répondre aux demandes de ceux qui souhaitent pouvoir s’en servir sans se brancher sur un ordinateur.
Toujours au CES, 28 acteurs impliqués dans la réalité virtuelle ont annoncé pour leur part la création d’une organisation dédiée à « renforcer la large disponibilité d’expériences audiovisuelles en réalité virtuelle de haute qualité », selon leur communiqué.
On retrouve aussi parmi les membres fondateurs des spécialistes du son et de l’image comme Dolby Laboratories et Technicolor, des acteurs venus du secteur de la télévision ou du cinéma comme Sky ou Sony Picture, des télécoms comme Huawei, Ericsson ou Verizon, ou encore de l’informatique comme Intel ou Qualcomm.
Le « Virtual Reality Industry Forum » réclame notamment de remédier à la « fragmentation » actuelle du marché avec des normes et formats compatibles avec tous les appareils. »Nous pensons que c’est essentiel pour que le marché décolle », a estimé Chris John, un ingénieur en chef chez Sky.
Le CES présente la plus large collection de technologies de réalité virtuelle jamais exposée à un salon, mais « c’est un peu mettre la charrue avant les boeufs », prévient pour sa part Peter Blau, un analyste du cabinet Gartner. « Beaucoup de gens savent ce que c’est, mais ils ne l’achètent pas vraiment ».
Il discerne toutefois les prémices d’un écosystème d’appareils, d’applications et de services qui constitueraient un grand pas en avant pour le secteur. « Il n’y a rien de comparable à mettre le casque et faire l’expérience » de la réalité virtuelle, dit l’analyste. « La partie décevante, c’est que c’est plutôt cher. La réalité virtuelle va être un peu freinée tant que la qualité ne s’améliorera pas et que les prix ne baisseront pas ».
AFP