Engluée dans la morosité six ans après sa révolution, la Tunisie met plus de 140 projets sur la table, pour quelque 30 milliards d’euros, lors d’une conférence économique mardi et mercredi en présence de plusieurs dirigeants internationaux.
Plus de 2.000 participants, de Tunisie et d’une quarantaine de pays, ont confirmé leur participation à ce rendez-vous destiné à « remettre la Tunisie sur la carte de l’investissement en Méditerranée »,
La conférence débute mardi à 08H00 GMT par son volet politique, avec le discours du président tunisien Béji Caïd Essebsi, puis ceux de l’émir du Qatar Tamim ben Hamad et des Premiers ministres algérien Abdelmalek Sellal et français Manuel Valls. Les principaux bailleurs de fonds internationaux sont également de la partie, et de nombreuses conventions bilatérales devraient être signées en 48 heures.
Parmi les 142 projets identifiés dans le cadre de la conférence, 64 concernent des investissements publics, 34 du partenariat public-privé et 44 sont strictement privés.
Ces programmes, dont certains sont en panne depuis la chute de la dictature de Zine El Abidine Ben Ali, concernent des domaines variés, des transports à l’économie numérique en passant par l’agriculture, les énergies et le tourisme. Ce dernier secteur, qui représentait près de 10% du PIB et 400.000 emplois au tournant de la décennie, a été ravagé par les attaques jihadistes ayant ensanglanté la Tunisie l’an dernier, en particulier celles du Bardo et Sousse (60 morts).
Cette crise est venue aggraver la situation d’un pays sous état d’urgence sécuritaire mais aussi « économique », d’après le gouvernement d’union entré en fonctions fin août.
Face au creusement des déficits, la Tunisie a dû souscrire en mai un nouveau plan d’aide auprès du Fonds monétaire international (FMI), de 2,6 milliards d’euros sur quatre ans.
Après avoir embauché massivement dans la fonction publique depuis 2011 afin de juguler la contestation sociale, le salut du pays passe désormais par le secteur privé, clame le ministre de l’Investissement Fadhel Abdelkéfi. Focalisée sur la transition politique, « la Tunisie a disparu des radars de l’économie mondiale depuis cinq ans », a-t-il de nouveau déploré lundi sur la radio Shems FM.
Mardi, avant les sessions thématiques, M. Abdelkéfi aura pour mission de vendre l’amélioration du « climat des affaires » du pays « le plus compétitif » d’Afrique du nord, selon lui. Il évoquera la nouvelle loi d’investissement, censée alléger les procédures administratives, mais devra aussi marquer l’engagement du gouvernement à lutter pour de bon contre les fléaux de la contrebande et de la corruption.
L’hôte tunisien convaincra-t-il? Il prévoit en tout cas de consolider son offensive par un nouvel appel à ne pas abandonner le dernier espoir non déçu des Printemps arabes.
« La communauté internationale doit investir dans la démocratie tunisienne », a résumé le chef du gouvernement Youssef Chahed, confronté à une grogne sociale persistante, en particulier dans la jeunesse victime d’un chômage massif.
Mercredi et jeudi, le président Béji Caïd Essebsi enchaînera sur un sommet Union européenne/Tunisie à Bruxelles. Premier partenaire économique, l’UE a annoncé un doublement de son soutien financier en 2017, à 300 millions d’euros.
Les pays européens, « tous les jours, nous félicitent pour l’orientation que nous avons adoptée et tous les jours annoncent des aides, mais ça vient au compte-gouttes », a affirmé lundi M. Caïd Essebsi dans un entretien à la chaîne Al Arabiya.
Pendant la conférence des investisseurs, « nous allons voir si les gens qui veulent nous aider vont vraiment nous aider », a-t-il ajouté.
AFP