L’Agriculture est, depuis quelques temps, sous les feux de la rampe. Chacun y va de son analyse pour argumenter les bienfaits de sa position stratégique dans l’après-pétrole. Et ce, en dépit d’une production encore chancelante, d’une mécanisation un peu défectueuse, et des pertes dans la céréaliculture couplée à l’émergence de nouveaux ravageurs de cultures, dont la lutte reste subordonnée à l’impératif de la préservation environnementale. C’est dans ce contexte que Rachid Bouzouane, ancien cadre du secteur et Directeur d’Agrichem, nous a accordé un entretien.
Algérie-éco : un Plan du renouveau agricole a été lancé par le gouvernement, couvrant 2015-2019. Qu’en pensez-vous ?
Rachid Bouzouane : Il ne peut être qu’intéressant pour peu que les principaux acteurs y adhérent pleinement, voire se mobilisent pour la conduite à terme. Des mécanismes de suivi pour évaluer l’état d’avancement du plan en question doivent être mis en place pour apprécier, à des échéances précises, les résultats.
L’agriculture saura-t-elle, effectivement et efficacement, drainer les recettes hors-hydrocarbures ? Quels sont, dans ce contexte, les forts et les faiblesses ?
Oui, si nous arriverons en premier lieu, à limiter les importations des produits alimentaires par une production locale suffisante, notamment sur les produits de consommation de première nécessité, tels les céréales, le lait…
L’exemple de la pomme de terre et celui de la tomate en sont les illustrations les plus édifiantes. Des programmes intelligents et mûrement réfléchis sur diverses cultures (Dattes, oignons, agrumes, olives en produits frais et/ou transformés entres autres) devront permettre effectivement à drainer des recettes intéressantes.
L’exportation de produits frais et/ou transformés doit, par ailleurs, répondre aux normes internationales. Sommes-nous déjà préparer pour répondre aux exigences du marché international ? (Respect des normes de production, de transport…,).
Le plan du renouveau agricole doit mobiliser, faut-il le préciser, toutes les mesures d’accompagnement pour l’atteinte des objectifs.
La réalisation de pôles d’Excellence annoncée par Mebarki, le ministre de la Formation et de l’Enseignement professionnels, devra-t-elle, apporter un plus ?
Je n’ai pas suivi dans le détail les plans en question et je ne saurais donner un avis. Mais dans la conjoncture que traverse le pays, je ne peux douter du bien-fondé de la réflexion que ce département ministériel a établie comme objectifs à atteindre.
Vous avez récemment organisé un séminaire sur les pertes à la levée dans les cultures céréalières. L’un des remèdes, chimique, fera à coup sur le bonheur des multinationales, mais portera un sérieux revers à l’environnement. Fallait-il, pour autant, y recourir ?
Comme tous les amoureux de la nature, j’œuvre toujours à protéger l’environnement. C’est notre milieu de vie. La protection des cultures fait appel à un raisonnement logique, quant, il y une possibilité d’utiliser une protection biologique, c’est merveilleux et c’est l’idéal même. Mais quand on n’a pas la solution biologique surtout devant des fléaux qui menacent notre alimentation. Que faut-il faire?
Devant les menaces qui peuvent être dévastatrices, il faut employer tous les moyens de lutte, dont, entres autre, agronomique, prophylactique, biologique, chimique….
Les produits chimiques sont effectivement des poisons, parfois mortels quand ils sont maladroitement appliqués.
L’application raisonnée de ces produits est, en revanche, une option salutaire. Lesquels produits sont comparables aux médicaments autorisés, et pourtant même les médicaments, pour beaucoup, sont également des produits chimiques que nous consommons pour sauvegarder notre santé.
Le raisonnement lié à l’emploi des produits phytosanitaires à usage agricole repose sur quelques paramètres qui devraient être respectés par tout utilisateur. Paramètres indicatifs, entres autres je cite : dose d’utilisation, stade biologique et phrénologique d’application, seuil de nuisibilité. Il y a aussi les paramètres climatiques liés aux matériels d’utilisation, aux délais avant récolte,
Il faut aussi prendre en considération le facteur de compatibilité avec d’autres produits, les recommandations spécifiques pour des produits particuliers, et les recommandations sur le magasinage des produits, ainsi que les conseils sur la préparation des bouillies sur le reste des bouillies non répandues sur les cultures. Comme ont peut, aussi, citer les mesures de sécurité d’emploi, notamment l’antidote du produit en cas d’accident et sur la protection des points d’eau…
Tous ces paramètres sont déterminés par des structures spécialisées qui font office d’Autorités scientifique et administrative. Aucun produit ne peut être mis sur le marché sans qu’il ne soit autorisé par la Commission nationale d’Homologation constituée par les représentants des 07 ministères souverains (Agriculture, Santé, Environnement, Commerce, Travail, Enseignement universitaire et Recherche scientifique, Industrie), auxquels on ajoute le Comité évaluation biologique et le Comité d’évaluation de la toxicologie.
Cette Commission instituée comme Autorité Phytosanitaire se réuni au moins une fois par an. Voyez-vous, l’intérêt qui est accordé à la santé humaine et à la protection de l’environnement et aussi à l’impératif d’assurer la sécurité alimentaire!
Je termine par cet exemple significatif révélé par des agriculteurs lors de cette journée traitant des pertes à la levée dans les cultures des céréales, tenue le 27.10.2016 à Kiffan Club, à Bordj El Kiffan (Alger). Nous citons le témoignage émanant de Guelma, suite à l’utilisation de la solution que notre société Agrichem avec son partenaire Syngenta ont proposée, pour juguler le problème provoqué la Fusariose (maladie) et le ver blanc (ravageur classé comme fléau donc lutte réglementée) sur les rendements des blés.
En voici les faits :
Habituellement, on y obtenait sur ses parcelles de blé, des rendements moyens autour de 10 quintaux. Mais après l’usage précité, la donne a changé : il y a eu un rendement de 25 qx.
Les utilisateurs ont changé uniquement le produit tout en gardant identiques les autres paramètres utilisés dans son itinéraire technique en parcelle comparative!
Des précisions s’imposent. Le traitement n’a touché ni le sol, ni la végétation, mais seulement la semence ; le cortège faunistique aérien a été protégé ; les frais globaux (main d’œuvre, labour, semis, autres traitements phyto (désherbage..) ont été maintenus, et ce sans que les problèmes de toxicité, de phytotoxicité, de pollution, de cadavres de petit animaux… ne soient signalés.
Tout compte fait, le céréaliculteur n’a, si j’ose dire, pas augmenté seulement son rendement, mais il a davantage multiplié sa surface de production par 2,5 tout en reconduisant sa culture!!!
Je conclus, dans notre cas, en touchant seulement à un paramètre soit le changement du produit phytosanitaire (nouvelle solution), il a été observé une nette augmentation du rendement.