« Maîtrise » et « formation » ont été les deux maîtres-mots des déclarations que le directeur général de l’Agence spatiale algérienne (ASAL) a faites lors de la conférence de presse qu’il a animée, ce matin, à l’hôtel Aurassi, à Alger. Une conférence dont la particularité tient au fait qu’elle s’est tenue deux jours après la survenance d’un évènement exceptionnel dans la jeune histoire spatiale algérienne : le lancement, le 26 de ce mois, à partir du site de Shriharikota relevant du Centre spatial de Satish Dhawan, au sud-est de l’Inde, de trois satellites algériens, fait à relever, « réalisés et testés par des compétences algériennes exerçant au niveau du Centre de Développement des Satellites (CDS), une unité opérationnelle de l’ASAL, implantées dans la commune de Bir-el-Djir, dans la wilaya d’Oran. Devant un parterre de journalistes, de responsables administratifs et scientifiques de l’ASAL et de représentants du ministère de la Défense nationale et de la Protection civile, deux importants « clients » de l’Agence, Azzedine Oussedik est, en effet, plusieurs fois revenu sur ces deux axes qu’il juge, à l’évidence, comme indispensables à la concrétisation de la volonté des pouvoirs publics de faire de l’Algérie un pays qui a son mot à dire dans l’utilisation de l’espace à des fins pacifiques. En clair, comme cela est explicitement précisé dans les objectifs du Programme spatial national (PSN), adopté en 2006 par le gouvernement et qui court jusqu’à l’horizon 2020, «à développer (ses) capacités en matière d’observation de la terre (à des fins) de développement durable et de renforcement de la souveraineté nationale ».
La formation, un axe cardinal
Des axes que l’ASAL prend très sérieusement en considération. Comme le dévoilent et son développement et celui de ses activités ces quinze dernières années. « En 2000, les effectifs (scientifiques) de l’ASAL ne dépassaient pas les 25 individus, aujourd’hui, nous sommes à 153 cadres », a déclaré, non sans fierté, à ce propos, Azzedine Oussedik. Qui, dans la lancée, n’a pas manqué d’ajouter qu’un grand nombre d’autres scientifiques, « choisis, a-t-il tenu à le préciser, parmi les meilleurs universitaires du pays, sont actuellement en cours de formation ». Bien mieux, il a dévoilé aux présents que dans toutes les opérations menées par l’ASAL, «ce volet n’a jamais été oublié ». Et ce, a-t-il expliqué, « par l’association à ces opérations de personnels en cours de formation ». L’importance que l’ASAL accorde à ce volet transparaît nettement des chiffres que Abdelwahab Chikouche, son directeur d’Etudes chargé des programmes spatiaux et du développement industriel, a donnés quand il a abordé l’accord de partenariat signé avec la Chine pour la réalisation et la mise en orbite de satellites destinés à la communication. Dans le cadre de cet accord, a-t-il révélé, « 150 titulaires d’un PHD et 170 ingénieurs sont actuellement en formation dans ce pays » ; les premiers « dans les technologies spatiales » et les seconds, « dans les techniques d’assemblage des satellites ».
La maîtrise des technologies de l’espace ne peut qu’être graduelle
Parallèlement à cet effort soutenu de formation, l’ASAL s’est lancé dans un autre visant, celui-là, à développer les infrastructures nécessaires à la concrétisation des objectifs contenus dans le PSN. Selon son DG, d’importantes réalisations dans ce domaine ont enregistrées depuis 2000. Tels, entre autres, le Centre de développement des satellites (CDS) d’Oran, les centres de contrôle au sol d’Oran et de Ouargla et la future station de suivi des satellites de télécommunication ; dont le premier, Alcom-sat 1, sera lancé, selon Azzedine Oussedik, « au plus tard, au mois de juin 2017 ». Des actions (de formation et de réalisation d’infrastructures) sur lesquelles le DG de l’ASAL s’est appuyé pour affirmer que «la maîtrise des technologies de l’espace ne peut se faire que par palier ». Ce que l’ASAL est, à l’évidence, en train de réussir. Comme le prouve, on ne peut mieux, le tableau retraçant « l’évolution de l’appropriation du savoir-faire technologique dans les différents segments de développement des projets nationaux des satellites d’observation de la terre ; au nombre de quatre : Alsat-1 et Alsat-1B, deux satellites d’observation de moyenne résolution, et Alsat-2A et Alsat-2B, deux autres de même type (l’observation) mais de haute résolution, ces satellites sont déjà en orbite. Dans les différents segments existants – la conception et la réalisation, les tests environnementaux, le transport vers le lieu de lancement, la campagne de lancement, la maîtrise de l’ouvrage et l’exploitation, à savoir – l’ASAL est, en effet, en train de réaliser des avancées remarquables. Qui ont fait dire à son DG qu’il « n’écarte pas la possibilité d’une maîtrise par l’ASAL, à l’horizon 2040, de tous les segments précités ». Y compris, a-t-il laissé entendre de celui « du lancement des satellites ».
Lancement du premier satellite algérien de télécommunication, en 2017
En attendant, comme entrevu plus haut, il a annoncé, pour le milieu de l’année prochaine, « le lancement du premier satellite algérien, Alcom-sat 1, destins aux télécommunications » ; télévision, radio, téléphonie et internet entre autres. Plus précis à ce sujet, il a déclaré que le développement de ce créneau, la réalisation de satellites de télécommunication, « se fera en partenariat avec la Chine ». Un partenariat d’autant plus nécessaire que ce type de satellites diffère fondamentalement de ceux destinés à l’observation de la terre, par leur poids : « Alcom-sat 1 pèsera 5 tonnes », nous a précisé Abdelwahab Chikouche, «alors que les infrastructures présentes de l’ASAL ne permettent que la réalisation de satellites d’un poids maximal d’une tonne ».
Coûts et revenus attendus
Interrogé sur le coût des satellites qui viennent d’être mis en orbite, le DG de l’ASAL a préféré, avant de donner les précisions demandées, insister sur les retombées positives de ces satellites sur l’économie et la sécurité du pays : « le développement économique du pays et la préservation de sa sécurité n’ont pas de coûts », a-t-il, en effet, déclaré. Avant de révéler que « le satellite Alsat-2A, lancé en juillet 2010, a coûté 3 milliards de DA, et le satellite Alsat-2B, 1,9 milliards de DA »; l’écart entre les deux coûts, s’expliquant, a-t-il ajouté, « par le fait que, contrairement au premier, le second a été conçu et réalisé par des compétences algériennes, en Algérie même ». Sur un registre proche, Azzedine Oussedik a déclaré que « depuis son lancement, Alsat-2A a réalisé 147 000 images sur différentes parties du globe, dont 70 000 sur l’Algérie ». Des images dont une partie est traitée, a-t-il ajouté, par «le Centre de réception et d’exploitation des images satellitaires », relevant de la 4ème région militaire de Ouargla. Et une autre, vendue à des pays étrangers. Parmi lesquels il a cité la Mauritanie, la Tunisie, le Tchad, le Niger et le Sénégal ». Concernant ce point précis, le DG de l’ASAL a annoncé « la création prochaine d’une filiale commerciale spécialisée dans la commercialisation, auprès de clients nationaux et étrangers, des images réalisées par les satellites algériens en orbite ».