Même si elle a gagné trois places par rapport à l’année précédente (elle occupait la 120é place), l’Algérie reste, avec la 117é place sur 135 qu’elle occupe aujourd’hui, l’un des pays du monde qui accuse le plus grand retard, en matière d’innovation dans l’économie numérique. Ce classement peu honorable tout récemment établi par le Forum Économique Mondial, ne lui permet même pas de figurer parmi les dix pays africains les plus avancés dans ce domaine.
Ce n’est pourtant pas faute d’argent, puisque l’Algérie a dépensé au minimum 8 milliards de dollars durant ces quinze dernières années pour étendre et le moderniser son réseau et ses applications internet. Il faut également savoir que les banques nationales, certaines grandes institutions et de nombreuses Start up ont également bénéficié d’importants financements publics pour développer et innover le numérique à usage économique. Certaines percées ont certes été effectuées mais le résultat reste globalement très insuffisant. En Algérie on ne peut toujours pas effectuer des transactions par internet, ni payer par carte de crédit, ce que des pays parmi les plus pauvres de la planète, ont réussi à effectuer. Dans notre pays l’usage des technologies de l’information et de la communication est effectivement en deçà des standards internationaux ce qui fait que l’Algérie ne figure même pas dans les pays des dix premiers pays d’Afrique où l’économie numérique a le mieux avancé. Le retard est dû au retard pris de façon préméditée par l’Algérie, qui avait refusé comme on le sait de développer le réseau internet au moyen du serveur de Pise que l’Unesco lui avait offert au début des années 90. Pour des raisons sécuritaires que la décennie noire pouvait sans doute justifier, ce serveur n’a pratiquement jamais été exploité. Si cela avait été fait l’Algérie serait aujourd’hui autrement plus avancée dans l’usage multiforme de l’internet, l’économie numérique y compris. Dans ce récent rapport du Forum Économique mondial intitulé « The Global Information Technology », la note de mesurant l’indice de pénétration du net (Networked Readiness Index) n’est que de 3.2. Cet indice qui regroupe des données à partir d’une cinquantaine d’indicateurs sert évaluer l’importance de la technologie et de l’innovation à travers le monde. Ces indicateurs renseignent sur la qualité de l’environnement économique et social dans les pays concernés, le type de régulation qui y prévaut, le climat des affaires, l’état des infrastructures, le niveau d’instruction, le courant des affaires etc..
Dans le classement mondial, une dizaine de pays africains devancent l’Algérie. Il s’agit de l’île Maurice (49e), l’Afrique du Sud (65e), les Seychelles (74e), le Maroc (78e), le Rwanda (80e), la Tunisie (81e), le Cap-Vert (85e), le Kenya (86e), l’Egypte (96e), la Namibie (99e) et le Botswana (101e), Ghana (102e), Côte d’Ivoire (106e), le Sénégal (107e), la Gambie (113e), le Lesotho (115e) et la Zambie (116e). Dans la région MENA (Moyen-Orient et Afrique du Nord), c’est l’Algérie et la Mauritanie (136e) qui occupent la fin du tableau.
L’économie de l’Algérie figure dans le groupe des pays à « haut-revenu intermédiaire ». Mais en matière d’impact social et économique des technologies de l’information et de la communication les performances de l’Algérie sont inférieures à la moyenne de ce groupe de pays. L’Algérie tire toutefois son épingle du jeu, quand on se base sur les critères de la compétence et des infrastructures. Ce sont effectivement les critères d’aptitude, de compétence et d’infrastructures à usage de TIC qui ont permis à l’Algérie d’éviter un classement encore plus catastrophique. Elle est 80é en matière d’infrastructures et 89é pour ce qui est du critère de la compétence qui, pour information, se base le taux d’alphabétisation, la qualité du système éducatif et l’importance accordée à l’enseignement des sciences et mathématiques.
Comme il fallait s’y attendre ce sont les critères déterminants de la politique, de la régulation, des affaires et de l’innovation, qui ont relégué l’Algérie aux tout derniers rangs de ce classement mondial (entre la 123é et 133é place). C’est sur ces leviers fondamentaux, essentiellement aux mains de l’État, qu’il faudrait par conséquent agir, si on veut que l’Algérie colmate quelque peu cette fracture numérique qui ne cesse de s’élargir faute de prise en charge par les plus hautes autorités politiques, comme cela s’est fait, dans les pays qui ont le mieux réussi dans le domaine des technologies de l’information de la communication.