Le scandale du diesel n’en finit pas de laisser sa marque sur les comptes du géant européen de l’automobile Volkswagen, qui a publié mardi un recul sensible de ses bénéfices au premier trimestre. Le groupe, maison-mère de douze marques parmi lesquelles Volkswagen, Audi, Porsche et Seat, a enregistré au premier trimestre « des résultats respectables dans un contexte difficile », a estimé dans un communiqué son patron Matthias Müller.
Le mastodonte allemand, éphémère numéro un mondial devant Toyota, est toujours en convalescence après la révélation en septembre d’une tricherie sur des millions de véhicules diesel dans le monde, pour les faire passer pour moins polluants qu’ils ne sont en réalité.
L’affaire lui a déjà valu en 2015 d’essuyer une perte nette de 1,6 milliard d’euros, la première depuis plus de vingt ans, sous l’effet des quelque 16 milliards d’euros mis de côté pour faire face aux suites du dieselgate.
Au premier trimestre, Volkswagen a certes enregistré un bénéfice à faire pâlir d’envie certains de ses concurrents, de 2,31 milliards d’euros, mais en baisse de 20% sur un an et inférieur aux attentes des analystes interrogés par le fournisseur de services financiers Factset. Le chiffre d’affaires a reculé de 3%, à 51 milliards d’euros.
La réputation de ce grand nom de l’industrie allemande est écornée, avec des impacts différents selon les marchés.
Aux Etats-Unis, où a éclaté le scandale, le coup de frein sur les livraisons est brutal, en particulier pour la marque VW (-12%) qui était déjà à la peine sur ce marché. En Europe, les livraisons ont légèrement crû au premier trimestre (+1,5%), mais stagné pour la seule marque Volkswagen.
Victime de l’effondrement du marché sud-américain, le groupe a de nouveau progressé en Chine, son premier débouché, mais à un rythme plus modéré que par le passé et au prix d’un recul de sa rentabilité.
La rentabilité du groupe s’est améliorée sur un an, surprenant favorablement les experts. Un bon point à mettre toutefois sur le compte d’effets exceptionnels (pour 300 millions d’euros), liés à la réévaluation comptable des provisions constituées pour faire face au scandale du diesel.
Celle de la marque Volkswagen, déjà en difficulté avant le scandale, est néanmoins proche de zéro. A la Bourse de Francfort, l’action Volkswagen a plongé de 19% depuis le début de l’affaire.
Le groupe a confirmé mardi ses prévisions pour l’ensemble de l’exercice 2016. Il table sur une marge opérationnelle, mesure de sa rentabilité, comprise entre 5 et 6%, et sur un repli jusqu’à 5% de son chiffre d’affaires.
Pour Frank Schwope, analyste de la banque Nord/LB, les ventes du géant européen devraient être stables sur l’année, même si pour cela le groupe « soutiendra vraisemblablement ses ventes par des rabais massifs ».
La plus grosse inconnue concerne l’impact financier final du dieselgate, alors que des procédures judiciaires ont éclos un peu partout dans le monde.
Le groupe est en négociations aux Etats-Unis pour finaliser un accord à l’amiable qui prévoit des compensations pour les propriétaires de plus de 480.000 voitures à moteur deux litres. Mais cela ne mettra pas fin à l’enquête pénale lancée par le département américain de la Justice, ni aux éventuelles actions judiciaires engagées par des clients américains s’estimant floués.
Parallèlement, Volkswagen met actuellement en oeuvre le rappel progressif des véhicules incriminés en Europe.
Schwope estime qu’on ne connaîtra « pas avant 10 ans » le montant total du dieselgate pour Volkswagen, qu’il évalue entre 20 et 30 milliards d’euros au bas mot, soit davantage que les 16 milliards provisionnés pour l’instant.
Volkswagen a voulu rassurer sur ce point, en insistant dans son communiqué sur ses caisses bien remplies, avec 26 milliards d’euros de trésorerie nette dans sa division automobile.
AFP