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Le ministre des Finances vient d’évoquer une prochaine refonte de la réglementation devant faciliter l’ouverture de bureaux de change, oubliant de dire que l’arsenal juridique existe déjà et qu’il ne demande en réalité qu’à être appliqué.
Toute une batterie de directives édictée en 1998 par la Banque d’Algérie organise en effet le marché des changes algérien et tout le problème réside dans le retard à la mettre en œuvre. On se souvient que des agréments ont même été donnés à de nombreux bureaux de change qui avaient acceptés de se lancer dans l’aventure déjà très risquée du cambiste, que compliquait encore davantage la présence d’un marché informel de la devise qui garantit des gains autrement plus importants que ceux dont doivent se contenter les agents de change agréés respectueux de la réglementation. La concurrence franchement déloyale a, comme on le sait, contraint bon nombre d’entre eux à fermer boutiques quelques semaines seulement après leur entrée en activité.
C’était pourtant une évidence que n’ignorait pas la Banque d’Algérie qui aurait commencé par faire le ménage au niveau des marchés informels de la devise qui prolifèrent dans tout le pays, avant de procéder à l’agrément de ces nouveaux bureaux de change. Tant que ce marché parallèle existera, aucun bureau de change ne peut en effet fonctionner selon les règles universelles du marché, quand bien même leurs gains (commissions) seraient artificiellement gonflés par la Banque d’Algérie. Il est évident que dans l’état actuel des choses il est beaucoup plus avantageux pour un citoyen possédant des devises de les changer au marché parallèle où il est sûr de gagner davantage que s’il le faisait au guichet d’une banque. Il faut bien se rendre à l’évidence que tant qu’il existera une demande en devises supérieure à celle autorisée par la Banque d’Algérie, tant que cette dernière ne comprendra pas qu’un citoyen qui a un besoin impératif d’euros ou de dollars ira naturellement les chercher là où ils se trouvent, les plus-values de change empochées par les opérateurs du marché parallèle seront toujours supérieures à celles que réaliseront les cambistes agréés. A l’évidence, ce marché parallèle né d’un déséquilibre entre l’offre et la demande, perdurera aussi longtemps que cette forte demande en devises persistera. Et même si le taux de change du dinar venait, on ne sait par quel miracle, à s’aligner sur celui du marché clandestin, ce dernier évoluera de manière à être toujours le plus fort.
Ne serait-ce que pour cette raison, l’éradication du marché parallèle des changes aurait dû précéder l’ouverture de guichets de changes. La disparition du change clandestin est d’une absolue nécessité si on veut pérenniser les bureaux de changes qu’on projette d’agréer, ces derniers n’étant pas en mesure d’affronter une concurrence aussi déloyale. Ce n’est malheureusement pas ce qu’ont fait les pouvoirs publics qui, bien au contraire, se sont ouvertement attelés à le maintenir. On se souvient de la déclaration de l’ex ministre de l’intérieur Dahou Ould Kablia qui avait mis en relief le caractère utile du marché parallèle contre lequel il ne faut surtout pas intervenir.
Outre l’éradication du marché parallèle de la devise, l’efficacité des guichets de change dépendra aussi et surtout, de la convertibilité totale du dinar à laquelle on avait pourtant fait allusion à l’occasion des réformes économique de 1990, sans jamais être parvenu à la rendre effective. Seule la convertibilité commerciale dont bénéficieront surtout les importateurs fonctionnera avec tous les désagréments causés à notre balance des paiements. Les experts sont pourtant unanimes à reconnaître qu’il était matériellement possible de réaliser cette convertibilité totale dans les années d’opulence, à savoir, entre 2008 et 2015. Il serait aujourd’hui bien difficile de le faire, reconnaissent- ils en cette période de déclin des réserves de change et des recettes d’hydrocarbures.
Cette convertibilité totale implique par ailleurs, et c’est le plus gros problème aujourd’hui, que notre économie fonctionne selon les règles universelles du marché et, de surcroît, avec des secteurs d’activités performants et, autant que possible, tournés vers l’exportation. Quand les recettes en devises dépendent, comme c’est actuellement le cas, exclusivement de l’exportation d’hydrocarbures à des prix volatiles, il n’est à l’évidence pas recommandé d’établir une convertibilité totale, au risque de provoquer une grave et irréversible érosion du dinar.
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